par Olzhas Auyezov
ALMATY (Reuters) - La Russie a envoyé des parachutistes au Kazakhstan dans le cadre d'une force de "maintien de la paix" avec pour objectif de mettre fin aux violentes émeutes qui secouent le pays, a annoncé jeudi l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), une alliance militaire entre plusieurs ex-républiques soviétiques.
La police kazakhe avait auparavant annoncé avoir "éliminé" plusieurs dizaines d'émeutiers à Almaty, la plus grande ville du pays, où l'annonce d'une forte hausse du prix des carburants a provoqué ces derniers jours les plus importantes manifestations depuis l'indépendance du pays en 1991.
Douze policiers et membres de la garde nationale ont été tués depuis mardi, a rapporté la télévision publique, ajoutant que l'un d'eux avait été retrouvé décapité.
Le président kazakh, Kassym-Jomart Tokaïev, a demandé mercredi l'intervention de l'OTSC, qui réunit la Russie, l'Arménie, la Biélorussie, le Kazakhstan, le Kirghizistan et le Tadjikistan, en dénonçant les agissements de groupes "terroristes" formés selon lui par des forces étrangères.
Jeudi matin, plusieurs véhicules blindés de transport de troupes et des dizaines de soldats ont pris position sur la principale place d'Almaty, où des centaines de personnes manifestaient pour le troisième jour consécutif, ont constaté des journalistes de Reuters.
Ils ont entendu des coups de feu au moment où les soldats se sont approchés de la foule mais la situation s'est ensuite calmée. Des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux, dont l'origine n'a pu être vérifiée, montrent des soldats patrouillant de nuit dans les rues d'Almaty et tirant en l'air ainsi que des scènes de pillage dans la ville.
LES COMPAGNIES ÉTRANGÈRES ANNULENT DES VOLS VERS ALMATY
La télévision publique a diffusé de son côté jeudi des images de civils s'emparant d'armes empilées dans une rue.
L'agence de presse Tass cite le ministère kazakh de la Santé selon lequel plus de 1.000 personnes ont été blessées pendant les manifestations et plus de 400 hospitalisées.
Les manifestants protestaient initialement contre la hausse du prix du gaz naturel liquéfié, très utilisé comme carburant automobile au Kazakhstan, mais le mouvement vise désormais directement le pouvoir en place, et notamment le "vieil homme", l'ex-président Noursoultan Nazarbaïev, 81 ans, qui a dirigé le pays d'une main de fer pendant près de 30 ans et dont la famille passe pour contrôler la majeure partie de l'économie.
Tokaïev a dénoncé des "gangs" qui, selon lui, "sapent l'intégrité de l'Etat" et explique que la population lui a réclamé une aide d'urgence.
Il a donné des ordres pour que la sécurité des ambassades étrangères et des entreprises à capitaux étrangers soit renforcée.
Le Kazakhstan, plus grand pays d'Asie centrale, riche en ressources naturelles, notamment pétrolières, bénéficiait jusqu'à présent d'une réputation de stabilité qui a favorisé des centaines de milliards d'euros d'investissements étrangers.
La télévision publique a rapporté que la banque centrale avait décidé de suspendre toutes les activités des banques et les liaisons internet ont été coupées dans la majeure partie du pays.
Plusieurs compagnies aériennes, dont l'allemande Lufthansa (DE:LHAG), ont annulé jeudi leurs vols réguliers vers Almaty.
(Reportage Mariya Gordeyeva, Pavel Mikheyev, Olzhas Auyezov et Polina Devitt; version française Jean Terzian et Marc Angrand, édité par Blandine Hénault)