PARIS (Reuters) - Les députés français ont approuvé mardi les dispositions du projet de loi anticorruption qui protègera les "lanceurs d'alerte" contre les représailles, après avoir voté la création d'une Agence anticorruption.
Le texte du projet de loi "Sapin 2" dit qu'un "lanceur d’alerte est une personne qui révèle, dans l’intérêt général et de bonne foi, un crime, un délit, un manquement grave à la loi ou au règlement ou des faits présentant des risques graves pour l’environnement, la santé ou la sécurité publiques, ou témoigne de tels agissements".
"Il exerce son droit d’alerte sans espoir d’avantage propre ni volonté de nuire à autrui. L’alerte ne saurait révéler quelque élément que ce soit relevant du secret de la défense nationale, du secret médical ou du secret professionnel applicable aux relations entre un avocat et son client", est-il précisé.
Un "lanceur d'alerte" qui fait l'objet d'un licenciement suite à son signalement ou à sa révélation, aura la possibilité de saisir le conseil des prud'hommes afin de bénéficier d'un référé conservatoire dans l'emploi.
Le conseil des prud'hommes pourra ordonner le maintien du salarié dans l'entreprise, ou en cas de refus du salarié, pourra ordonner le maintien du salaire jusqu'au prononcé du jugement.
Auparavant, l'Assemblée avait adopté l'article créant une Agence française anticorruption qui remplacera, en la dotant de plus grands pouvoirs, le Service central de prévention et de corruption (SCPC).
Les députés devaient ensuite examiner la mise en place d'une "convention judiciaire d'intérêt public" qui permettra aux entreprises mises en cause de négocier et d'acquitter une sanction financière plutôt que de subir une condamnation pénale.
Le ministre des Finances, Michel Sapin, qui proposait initialement l'instauration d'une transaction pénale, a annoncé lundi qu'il s'en remettrait "à la sagesse" de l'Assemblée. Ainsi, cette procédure de "convention judiciaire d’intérêt public" sera laissée à la discrétion de l’autorité judiciaire. Elle devra garantir les droits de la défense.
Un millier d'amendements ont été déposés sur la soixantaine d'articles que compte le projet de loi Sapin 2.
Le débat à l'Assemblée devrait se poursuivre toute la semaine, les députés devant se prononcer le 14 juin par un vote solennel sur l'ensemble de ce texte que le Sénat devrait débattre à son tour au début juillet.
Le groupe PS et celui des radicaux de gauche y sont favorables. Celui du Front de gauche a dit attendre la fin de l'examen pour se prononcer.
"Nous ne voterons pas en l'état ce texte", a dit mardi son président, André Chassaigne, qui a jugé "inacceptables" des dispositions inspirées par le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, qui visent à faciliter l'accès à certains métiers en révisant le niveau de qualification exigé.
Si le groupe UDI (centriste) devrait s'abstenir, le groupe Les Républicains (LR) a confirmé mardi qu'il votera contre.
"La loi Sapin 2, c'est de nouvelles contraintes pour nos entreprises. Nous n'avons pas besoin de ça", a dit Christian Jacob, le "patron" des députés LR, en dénonçant plusieurs dispositions du texte comme celles relatives à la rémunération des chefs d'entreprise.
(Emile Picy, édité par Yves Clarisse)