La France a renoué cet été avec une croissance légère, une surprise pour de nombreux économistes, qui voient dans cette bouffée d'air une illusion de courte durée, mais la preuve aux yeux du gouvernement de la solidité de l'économie française et du bien-fondé de sa politique.
Selon une première estimation de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) pour le troisième trimestre, publiée jeudi, le produit intérieur brut (PIB) a rebondi de 0,2% par rapport au trimestre précédent, premier chiffre de croissance positif depuis un an.
"Cela montre que la France est une économie solide, qui a un potentiel de rebond", "ça vient démentir les craintes de récession", a assuré le ministre de l'Economie Pierre Moscovici à l'AFP.
Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a lui salué "un indicateur prometteur", appelant à "persévérer dans la politique que nous avons engagée".
Le chef du gouvernement est arrivé jeudi à Berlin, sur fond de rumeurs de critiques des choix politiques français par les Allemands. Mais, une fois n'est pas coutume, la croissance a été identique au troisième trimestre des deux côtés du Rhin. Pour l'Allemagne, il s'agit d'un ralentissement par rapport aux premier (0,5%) et deuxième (0,3%) trimestres.
Quant à la zone euro, elle est officiellement entrée en récession cet été pour la deuxième fois en trois ans, enregistrant un recul du PIB de 0,1%.
En France, l'Insee a en revanche révisé à la baisse ses chiffres pour le deuxième trimestre, constatant un recul de l'économie de 0,1% alors qu'il avait auparavant annoncé une stagnation, comme celles observées fin 2011 puis début 2012.
Il s'agit de la première rechute en territoire négatif depuis que la France est sortie, au printemps 2009, de la plus grave récession depuis l'après-guerre.
Les chiffres de l'été vont dans le sens du gouvernement qui avait annoncé fin octobre tabler sur une croissance "légèrement positive". Mais ils sont supérieurs aux prévisions du consensus des économistes et de l'Insee, qui tablaient sur une nouvelle période de "croissance zéro", et à celle de la Banque de France, qui avait prédit un recul du PIB de 0,1%.
Pour Pierre Moscovici cependant, le rebond "conforte l'idée qu'une croissance de 0,8% en 2013 reste un objectif réaliste, mobilisateur et atteignable". Il a également maintenu la prévision de 0,3% en 2012, qui suppose un quatrième trimestre à nouveau positif.
Dans le détail, la croissance est tirée par une augmentation de la demande intérieure et un solde du commerce extérieur positif, grâce notamment à une accélération des exportations portées par le niveau exceptionnel des ventes aéronautiques et spatiales. A l'inverse, le choix des industriels d'écouler leurs stocks plutôt que de les reconstituer a pesé négativement.
"La consommation des ménages en hausse de 0,3% et les exportations en hausse de 0,5%, vu l'environnement européen dans lequel la France évolue, c'est très bien", a expliqué à l'AFP Hélène Baudchon, économiste chez BNP Paribas.
Pour elle, une autre surprise est "l'investissement des entreprises non financières qui ne recule que de 0,4% sur le 3e trimestre". "C'est un recul d'ampleur limitée vu l'incertitude à laquelle les entreprises sont confrontées, le peu de débouchés en interne, en externe, à même de lourdement peser sur les décisions d'investissement", a-t-elle décrit.
Mais selon Michel Martinez, de la Société générale, "les chiffres de septembre et les enquêtes de conjoncture laissent plutôt présager une fin d'année et un début de 2013 plus mauvais".
"Etant donné les premiers indicateurs de stagnation en octobre, nous nous attendons à ce que la fragilité que nous avions annoncé pour le 3e trimestre et qui ne s'est pas concrétisée apparaisse au 4e trimestre", renchérit Tullia Bucco, économiste à Unicredit, dans un communiqué.
"La dégradation de la situation des marges des entreprises non financières et la baisse significative du pouvoir d'achat des ménages pèsera sur l'activité économique", prédit-elle.