par Natalia Zinets et Richard Balmforth
KIEV (Reuters) - Angela Merkel, en visite à Kiev pour la première fois depuis le début du conflit ukrainien, a estimé samedi qu'il était encore possible de rétablir la paix dans l'est du pays, mais seulement en renforçant le contrôle de la frontière, que le convoi d'aide humanitaire russe a repassée en sens inverse.
A trois jours d'un sommet qui réunira les présidents ukrainien et russe et les dirigeants de l'Union européenne mardi à Minsk, en Biélorussie, la chancelière allemande a appelé Kiev et Moscou à s'entendre sur un plan de sortie de crise.
"Il faut être deux pour parvenir au succès. On ne peut pas faire la paix seul. J'espère que les discussions avec la Russie mèneront à la paix", a déclaré Angela Merkel au cours d'une conférence de presse commune avec le président ukrainien, Petro Porochenko.
Evoquant le sommet de Minsk, la chancelière a ajouté : "Les propositions sont sur la table (...) Il faut les traduire en actes."
Angela Merkel a plaidé pour l'adoption d'un cessez-le-feu "accepté par les deux camps" dans l'est de l'Ukraine, où les combats entre les forces gouvernementales et les rebelles séparatistes ont redoublé d'intensité ces derniers jours.
Mais elle a souligné qu'il ne pourrait y avoir de retour au calme sans un meilleur contrôle de la frontière russo-ukrainienne, par laquelle Kiev et les pays occidentaux accusent la Russie de livrer des armes lourdes aux séparatistes, ce que Moscou dément.
Pour y parvenir, elle a proposé que l'Ukraine et la Russie acceptent de confier la surveillance de la frontière aux observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).
Petro Porochenko s'est dit ouvert à la recherche d'une solution pacifique au conflit dans le Donbass mais pas, a-t-il prévenu, "au prix de la souveraineté, de l'intégrité territoriale et de l'indépendance de l'Ukraine".
Le président ukrainien a ajouté que le calme reviendrait rapidement dans l'est du pays dès que les "mercenaires étrangers" - venus de Russie - en seraient repartis.
LE CONVOI EST REPARTI
Quelques heures avant l'arrivée d'Angela Merkel à Kiev, de violents tirs d'artillerie ont ébranlé Donetsk, le principal fief des séparatistes, où des journalistes de Reuters ont vu des immeubles détruits et des flaques de sang à l'endroit où, selon des habitants, deux civils ont été tués.
L'intensification des bombardements pourrait traduire la volonté de l'armée de Kiev de réaliser une percée avant la Fête nationale, dimanche, journée de célébration de l'indépendance du pays.
Dans l'autre bastion séparatiste, Louhansk, le convoi de 220 camions russes transportant de l'aide humanitaire, selon Moscou, a achevé son déchargement et a repassé la frontière, 24 heures après être entré en territoire ukrainien sans accord des autorités de Kiev ni escorte du Comité international de la Croix-Rouge.
La télévision russe a diffusé des images du déchargement d'une partie des camions dans un dépôt de Louhansk. La ville, encerclée par l'armée ukrainienne, est privée d'électricité et d'eau depuis plusieurs semaines, ce qui fait craindre une crise humanitaire aux organisations internationales.
L'OSCE a confirmé dans l'après-midi que tous les camions étaient repassés du côté russe de la frontière, sans que l'on sache avec certitude ce qu'ils contenaient à l'origine.
A Bruxelles, l'Otan a dit avoir été informée de tirs d'artillerie russes visant les forces de Kiev.
"Depuis la mi-août, nous avons de multiples informations sur l'implication directe des forces russes - y compris l'aviation, la défense antiaérienne et les forces spéciales - dans l'est de l'Ukraine", a déclaré Oana Lungescu, porte-parole de l'Alliance atlantique.
"Les tirs d'appui de l'artillerie russe, à la fois transfrontaliers et depuis l'intérieur de l'Ukraine, sont utilisés contre les forces armées ukrainiennes", a-t-elle ajouté.
La Russie nie apporter la moindre aide matérielle aux rebelles ukrainiens et accuse Kiev de s'attaquer à des civils sans défense avec l'appui de l'Occident.
(Avec Madline Chambers, Tangi Salaün pour le service français)