LONDRES (Reuters) - Les consommateurs français achètent moins de produits d'hygiène personnelle et de produits ménagers fabriqués par de grandes marques comme P&G et Unilever (LON:ULVR) alors que les prix augmentent, montrent des données compilées pour Reuters.
Ce changement dans les habitudes de consommation pourrait renforcer les tensions entre distributeurs, responsables politiques et fabricants de biens de consommation qui s'affrontent depuis des mois sur les prix des denrées alimentaires.
Les données recueillies par NielsenIQ montrent que le volume global des ventes de gel douche, de tampons, de produits pour la vaisselle, de lessive et de papier toilette a diminué sur un an au 17 septembre.
Les prix des produits de chacune de ces catégories dans les supermarchés ont considérablement augmenté depuis le début du mois par rapport à la même période l'année dernière.
"Lorsqu'il existe de bonnes alternatives en matière de marques de distributeur, on observe un changement important en faveur des marques de distributeur", a déclaré Anton Delbarre, chef économiste chez Eurocommerce, la fédération européenne du commerce de détail et de gros.
"Ce que l'on constate également, c'est que certaines personnes mangent moins, se douchent moins, nettoient moins la maison ou utilisent un peu moins de produits pour leur lave-vaisselle ou leur lave-linge", a-t-il dit.
Le gouvernement français devrait aborder mercredi la question des prix des produits alimentaires lors de la présentation de son budget pour 2024, et adopter une loi visant à avancer les négociations annuelles entre les marques et les supermarchés afin que les baisses de prix prennent effet à partir du 15 janvier au lieu du 1er mars habituel.
Des fabricants de produits alimentaires tels que Nestlé (SIX:NESN) et Pepsico ont été critiqués par les supermarchés et les responsables politiques pour ne pas avoir "coopéré" dans les négociations et pour avoir réduit la taille des produits ou la quantité de produit à l'intérieur des emballages, tout en maintenant ou même augmentant leurs prix.
Carrefour (EPA:CARR) a apposé la semaine dernière des autocollants sur des produits dont la taille a diminué mais qui coûtent plus cher, même si les prix des matières premières ont baissé, afin de rallier le soutien des consommateurs et de faire pression sur les marques à l'approche de négociations contractuelles.
Des marques de consommation bien connues, telles que la lessive Ariel et le savon Dove, dominent depuis des années le marché par rapport aux marques de distributeur.
Les données de NielsenIQ montrent toutefois que les volumes des ventes des produits personnels sous marque de distributeur augmentent légèrement tandis que ceux des grandes marques diminuent.
Par exemple, les volumes de gel douche ont baissé de 6% dans l'ensemble et de 10% pour les grandes marques, mais ont augmenté de 14% pour les marques de distributeurs.
De même, alors que les volumes de détergents ont baissé d'environ 2% dans l'ensemble de la catégorie et de 10% pour les grandes marques, ils ont augmenté de 28% pour les marques de distributeurs.
Les consommateurs ont acheté moins de gel douche, de tampons, de liquide vaisselle, de détergents et de papier hygiénique des grandes marques au cours de l'année au 17 septembre, mais plus de chaque type de produit sous marque de distributeurs.
Unilever a refusé de commenter et P&G n'a pas répondu à une demande de commentaire.
"Les volumes de biens de consommation sont faibles en raison de la faiblesse de l'économie française", a déclaré Bruno Monteyne, analyste chez Bernstein.
Le directeur général de Carrefour, Alexandre Bompard, a alerté en août sur une baisse de la consommation en France, notamment sur les produits de première nécessité en raison des prix élevés, et a souhaité un moratoire d'un an sur l'application de la loi Descrozailles, qui devrait entrer en vigueur en mars 2024 et limiter les promotions pour ce type de produits.
Selon lui, la nouvelle loi limitera le pouvoir de négociation de Carrefour avec les grands fournisseurs tels que Procter & Gamble (NYSE:PG), Henkel (ETR:HNKG_p) et Unilever.
Une partie des changements dans la consommation devrait persister même après l'atténuation des prix, a prévenu Anton Delbarre d'Eurocommerce.
"Les gens se rationnent, en partie à cause de la baisse de leur pouvoir d'achat, mais aussi parce que les salaires sont toujours à la traîne par rapport à l'inflation", a-t-il déclaré.
"Une fois que les salaires auront rattrapé l'inflation, cet effet devrait probablement s'atténuer, mais il subsistera en partie car les gens créent de nouvelles habitudes".
(Reportage Richa Naidu et Helen Reid ; version française Diana Mandiá, édité par Kate Entringer)