Cela s'annonçait comme l'introduction en Bourse la plus importante de l'année en France mais Spie a dû reporter jeudi son projet de cotation, victime d'un accès de frilosité des investisseurs qui va contrarier sa volonté de se désendetter.
"Compte tenu des condition de marché, le groupe a pris acte de la situation et a pris la décision la plus sensée", a commenté à l'AFP une source proche du groupe.
"Au regard de conditions de marché devenues particulièrement volatiles, le conseil d’administration de Spie a décidé de reporter son introduction en Bourse", avait expliqué plus tôt Spie dans un communiqué.
Spie affiche aussi sa volonté "de poursuivre sa stratégie de développement et de croissance" mais ne se prononce pas sur une reprise prochaine ou non du processus d'entrée en Bourse.
"Les perspectives de réouverture du marché sont incertaines", a avancé la source proche du groupe.
Pour Spie, cette introduction en Bourse devait être l'aboutissement de dix années d'une croissance forte, 9% en moyenne par an depuis 2006, et une progression de ses marges, le groupe se hissant parmi les leaders européens des services techniques dans l'énergie et les communications.
Elle devait aussi offrir une porte de sortie aux fonds qui avaient participé au financement du groupe par endettement (leverage buy-out), une première fois en 2006, puis en 2011 avec l'entrée au capital de Clayax Acquisition Luxembourg 1, un consortium formé de Clayton Dubilier & Rice, Ardian et la Caisse de Dépôt du Québec.
L'opération devait s'élever à un milliard d'euros (et même 1,2 milliard selon le scénario le plus optismiste), soit potentiellement la plus importante de l'année en France, et donner au groupe une valorisation totale d'environ 2,5 milliards d'euros. Mais elle s'est heurtée à des conditions de marché de plus en plus défavorables à mesure que la phase de consultation des investisseurs avançait.
"Le marché est devenu très rétif au risque, et il a été constaté cette fermeture rapidement après le lancement du roadshow", a indiqué cette source proche du groupe.
Depuis juillet, lorsque le groupe a enregistré son document de base et lancé le processus d'introduction sur Euronext, le CAC 40 a perdu plus de 6%.
Spie avance également des éléments macroéconomiques plombants comme "l'annonce de la BCE de ne pas prendre de mesures supplémentaires pour soutenir l'économie européenne et la révision à la baisse des prévisions de croissance du FMI pour la zone euro".
Les marchés ont aussi été refroidis par les premiers pas décevants des groupes allemands Rocket et Zalando, qui ont fait récemment leur entrée à la Bourse de Francfort.
- "Business model très résiliant" -
Conséquence: le carnet d'ordre n'était pas rempli à la veille de la fixation du prix de l'offre qui devait intervenir ce jeudi, et pour laquelle la fourchette indicative allait de 15 à 18,30 euros.
La cotation devait démarrer vendredi, sous forme de promesses d'actions.
La stratégie développée par Spie ces dernières années pour présenter un visage attractif aux marchés - via une croissance externe forte avec une moyenne de 150 à 200 millions d'euros d'acquisitions par an et un rééquilibrage de son activité en Europe - n'aura donc pas suffi à compenser la frilosité ambiante des marchés.
Structurellement, le groupe ne devrait cependant pas être pénalisé par le report de son introduction sur Euronext, même si l'annulation de l'augmentation de capital de 525 millions d'euros repoussera forcément l'objectif de désendettement du groupe.
"Spie a les moyens de continuer la mise en oeuvre de sa stratégie, son business-model est très résiliant, sa génération de cash est bonne, le management est bon et a été salué comme tel par les investisseurs rencontrés, les contrats sont là", a argumenté la même source proche du groupe.
En 2013, le groupe a réalisé un chiffre d'affaires de 4,6 milliards d'euros. Il vise pour la période 2015-2018 une croissance organique entre 2,5 et 3,5% par an et une croissance de ses marges de 0,1 à 0,2 point de pourcentage chaque année.