Après deux mois de renégociation de leur "contrat d'avenir", les 25.000 buralistes français ont obtenu du gouvernement vendredi une hausse de leur rémunération, en partie absorbée par un prélèvement sur le chiffre d'affaires des fabricants, qui vont, par ricochet, augmenter les prix des cigarettes après deux ans de stabilité.
Les buralistes vont bénéficier d'une hausse de la marge qu'ils perçoivent sur la vente de tabac, qui passera de "6,9% à 8% net du prix du paquet entre 2017 et 2021", a annoncé le secrétaire d’État au Budget, Christian Eckert, face à 550 buralistes, au deuxième jour de leur congrès à Paris.
"La hausse nette sera de 1,1 point entre 2017 et 2021, contre 0,4 point pour le contrat en cours, soit près du triple. La hausse sera de 0,6 point dès 2017", a-t-il précisé.
Pour financer cette hausse de rémunération, le gouvernement a décidé d'instaurer un nouveau prélèvement sur le chiffre d'affaires des fabricants, a annoncé M. Eckert.
Ce prélèvement vient s'ajouter à une augmentation déjà prévue "de la fiscalité sur le tabac à rouler, qui connait des ventes en trop forte progression", a rappelé le secrétaire d’État, ainsi qu'à une autre taxe dont la création avait été annoncée fin septembre, visant aussi les fabricants de tabac, qui pourrait elle rapporter un peu plus de 100 millions d'euros par an à l’État.
"Il faut que ce soit les fabricants qui rognent sur leurs marges, et ils peuvent le faire car elles sont très supérieures en France à ce qu'elles sont à l'étranger", a insisté M. Eckert.
- Le tabac augmentera dès janvier -
Les buralistes se sont dits satisfaits des annonces du gouvernement, qui "répondent aux inquiétudes de la profession", selon Pascal Montredon, président de leur confédération.
"La hausse de la rémunération vient notamment compenser la charge de travail supplémentaire liée à l'arrivée du paquet neutre. Il s'agit aussi d'un accompagnement à la modernisation car nous sommes conscients que le réseau doit continuer à évoluer et être moins tributaire du tabac", a-t-il affirmé.
Conséquence de cette surtaxe imposée aux fabricants, ceux-ci promettent déjà de la répercuter sur le prix du paquet de cigarettes, ce qui constituera la première augmentation après deux années de stabilité complète.
Le cigarettier Japan Tobacco International (JTI) a ainsi regretté dans un communiqué un "empilement de hausses de taxes" et prévient qu'elles "seront inévitablement répercutées dans les prix de vente au détail des cigarettes et du tabac à rouler et seront, in fine, payées par le consommateur".
"Avec ces hausses, il va falloir ajouter 0,20 euros ou 0,30 euros par paquet de cigarettes", estiment plusieurs sources proches du dossier. M. Eckert s'est lui contenté d'espérer "que nous puissions avoir une année de stabilisation, voire d'une hausse mais modérée du prix de vente au public".
Éric Sensi-Minautier, directeur des affaires publiques chez British American Tobacco (LON:BATS), déplore lui des annonces faites "sans concertation", expliquant lui aussi qu'"il est évident que tous les fabricants vont répercuter ces hausses sur le prix du tabac".
Philip Morris (NYSE:PM) France explique de son côté dans un communiqué que "sur un marché français déjà très sensible où les prix sont les plus élevés d'Europe continentale, toute nouvelle mesure fiscale pourrait entraîner une déstabilisation du marché légal du tabac, qui sera déjà fortement impacté avec l'arrivée du paquet neutre".
"Une telle hausse de la rémunération engendrera nécessairement une augmentation des prix, ce qui créera une nouvelle distorsion entre la France et ses voisins frontaliers tout en encourageant les achats parallèles", c'est-à-dire à l'étranger ou au noir, dénonce à son tour Seita.
La dernière hausse, en janvier 2014, avait porté le prix du paquet le moins cher à 6,50 euros et celui du plus cher, notamment la marque la plus vendue (Marlboro), à 7 euros.