Après avoir longuement interrogé des dizaines de milliers de voyageurs, la SNCF veut intégrer leurs rêves dans le cahier des charges de ses futurs TGV, afin de faire revivre "l'imaginaire du voyage en train".
Convaincue que la grande vitesse ferroviaire fera l'Europe de demain, une Europe où les transports seront libéralisés, la SNCF s'appuie sur son expérience. Elle veut aussi aller plus loin, en imaginant "le TGV qui fera la différence dans ce nouvel espace concurrentiel". On devrait en avoir un premier aperçu dans deux ans.
"Ce que l'on veut, c'est récupérer pleinement l'univers des trains du début de l'aventure, récupérer l'imaginaire du couloir latéral" et des rencontres qu'on pouvait y faire, décrit Mireille Faugère, directrice générale déléguée SNCF Voyages.
La SNCF s'appuie pour ce faire sur "Imagine TGV", une vaste enquête européenne lancée à l'automne 2008. La société a analysé 220.000 réponses, dont 5.500 dans les pays voisins. Elle a fait dessiner 500 voyageurs, cheminots et personnalités, pour qu'ils décrivent en images le voyage à grande vitesse dont ils rêvent.
En outre, une "boîte à idées" à été ouverte sur internet. Baptisée TGVLab, elle est destinée à recueillir les avis et suggestions des clients. Histoire de glaner quelques bonnes idées.
Ces enquêtes ont permis de définir "trois imaginaires", résume Mireille Faugère: le voyageur "flèche" entend voyager efficacement: aller rapidement du point A au point B, tout en restant connecté à son environnement de travail; le voyageur "bulle" profite du voyage pour "récupérer du temps pour lui" et faire une pause; le voyageur "fusée", enfin, "veut quelque chose qui soit excitant" pour "vivre intensément le temps de transport".
On devrait retrouver ces profils dans trois types d'aménagements, correspondant à autant d'ambiances. La SNCF parle d'"espaces de vie".
Les voyageurs "bulle", 60% des répondants, se retrouveront dans le "cocon": c'est "un train où tout va bien", note Mme Faugère. Ils y seront chouchoutés.
Les autres apprécieront les "quartiers": un espace à partager avec leur famille et leurs amis. "Avec les voitures de 1e classe de TGV Pro, on a déjà des petits quartiers d'affaires", poursuit-elle. Le concept TGV Family destiné aux familles -- mais où la moitié des voyageurs sont sans enfants -- en est aussi une configuration.
La SNCF va également plancher sur le concept de "place de village", "le lieu où l'on rencontre les gens qu'on ne connaissait pas".
A cet égard, le bar sera l'objet de toutes les attentions. "Jusqu'à présent, on l'a surtout conçu pour que les gens n'y restent pas, sauf pour faire la queue très longtemps", reconnaît Mireille Faugère. Elle veut "retrouver l'esprit du zinc".
Il s'agit enfin de réhabiliter les plateformes entre les wagons, pour qu'elles deviennent des lieux où les gens autont envie de rester. "Aujourd'hui, la plateforme est un non lieu", dit-elle. "Il y a beaucoup de mètres carrés dans lequel vous n'êtes pas bien, en transit d'une voiture à l'autre ou vers les toilettes. C'est du gâchis!"
La SNCF attend un début de concrétisation sur les rames rénovées qui seront mises en service sur la ligne Rhin-Rhône fin 2011.
Ces espaces seront progressivement généralisés, au gré des achats et des rénovations. Mireille Faugère va loin, puisqu'elle évoque le concept de "TGV 2041" (trente ans après le trentième anniversaire du TGV, inauguré entre Paris et Lyon en 1981).
Elle compte mettre des designers à contribution. Et aussi "faire imaginer aux enfants d'aujourd'hui ce qu'ils veulent pour TGV 2041, puisque ce sera le leur!"