CALAIS (Reuters) - Le démantèlement d'une partie du bidonville de Calais, où se concentrent des milliers de migrants dans l'espoir de passer au Royaume-Uni, a débuté lundi dans un climat électrique.
En milieu de journée, les opérations ont donné lieu à des jets de pierres de la part de migrants et de militants et des tirs de gaz lacrymogènes de la part des CRS en guise de riposte et des abris de fortune ont été incendiés.
Environ 150 à 200 personnes, migrants et militants confondus, faisaient face aux forces de police, déployées en nombre dans la matinée, selon un journaliste de Reuters présent sur place.
La situation s'est à nouveau tendue en début de soirée, lorsque des migrants ont lancé des projectiles sur des véhicules qui empruntaient la route jouxtant la "jungle" et menant au port de Calais.
La préfecture du Pas-de-Calais a confirmé dans la matinée avoir mis en place "un dispositif de protection des forces de sécurité pour permettre à la société qui procède au retrait des tentes et abris inoccupés d'effectuer son travail".
Une vingtaine d'ouvriers encadrés de policiers sont arrivés au niveau de "La Lande", le bidonville situé le long de la rocade portuaire de Calais. Environ 3.000 migrants y séjourneraient encore.
Ils ont débuté le nettoyage de la partie sud de la zone, vouée par la préfecture à être rasée, sauf pour ce qui concerne les espaces publics comme les écoles, conformément à une décision de justice prise la semaine dernière.
"COUP DE FORCE"
En fin de journée, 5.000 mètres carrés avaient été évacués, et les forces de l'ordre avaient procédé à l'arrestation de quatre personnes - trois activistes et un migrant - qui voulaient s'y opposer.
"Je ne suis pas surpris par le coup de force de la préfète, c’est une opération précipitée, mais ce qui est étonnant c’est qu’ils détruisent les cabanes alors que l’offre en conteneurs (qui permettent d'abriter les migrants sur place) est réduite à 100 places", a déclaré à Reuters François Guennoc, secrétaire de l’Auberge des migrants.
"Cette opération fait relativiser les propos apaisants du ministre et de la préfète. Les migrants vont s’enfuir dans les bois, et la police va devoir les déloger là ils vont se cacher."
La préfète du Pas-de-Calais Fabienne Buccio a justifié dans son communiqué l'importance du dispositif policier par "la présence de nombreux activistes extrémistes qui ont intimidé les migrants pour qu'ils n'acceptent pas les propositions d’hébergement" et qui auraient empêché plusieurs migrants de monter dans un bus à destination d'un centre d’accueil.
Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve avait promis la semaine dernière que le démantèlement de la partie sud de la jungle se ferait progressivement, sans "brutalité".
Les associations opposées à l'évacuation ont introduit un recours devant le Conseil d'Etat contre la décision du tribunal administratif de Lille autorisant le démantèlement, a indiqué un porte-parole de l'Auberge des Migrants.
(Pascal Rossignol, avec Pierre Savary, édité par Simon Carraud)