La justice, qui devait dire vendredi si elle accorde finalement un non-lieu à Claude Chopin, ancien patron de l'usine Amisol emblématique du scandale sanitaire de l'amiante, mis en examen il y a 17 ans pour des faits remontant à 1974, va finalement reporter sa décision.
La cour d'appel de Versailles devait se prononcer vendredi mais a décidé que sa décision serait prorogée, selon une source judiciaire. La nouvelle date sera connue vendredi.
Seul à être poursuivi dans ce dossier, Claude Chopin, 68 ans, est mis en examen depuis 1999 pour homicides et blessures involontaires.
Si les victimes de l'amiante espèrent un jour un procès, la défense de M. Chopin demande, elle, un non-lieu dans une affaire "sans équivalent en France" où l'on approche le "demi-siècle" après les faits.
En 2013 puis 2015, la cour d'appel de Paris avait accordé à Claude Chopin, faute de charges, ce non-lieu qu'il réclamait notamment au nom du "délai raisonnable". Non-lieux annulés à deux reprises par la Cour de cassation saisie par les parties civiles.
Lors du troisième examen de la requête de Claude Chopin, le 2 décembre, devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, l'avocat général a de nouveau requis le non-lieu.
Mais quoi que juge la cour, l'affaire devrait encore rebondir: chacune des deux parties promet un nouveau pourvoi en cassation si la décision lui est défavorable.
L'enquête avait démarré en 1997, année de l'interdiction de l'amiante, après une plainte de salariés de cette usine d'amiante de Clermont-Ferrand, qui avaient développé des maladies liées à leur exposition à cette substance dont le caractère cancérogène est connu depuis les années 1950.
Claude Chopin avait été mis en examen en tant qu'ancien patron de ce que l'Andeva, l'association des victimes de l'amiante, a décrit comme une "usine cercueil" dont l'air était "saturé de fibres mortelles".
Alors âgé de 26 ans, il en avait pris la tête pendant six mois en 1974 après la démission de son père, depuis décédé. L'usine avait ensuite fermé ses portes.
En juin 2016, la Cour de cassation avait estimé que M. Chopin avait "le devoir" de "s'assurer personnellement du respect constant de la réglementation en matière d'hygiène et de sécurité des travailleurs", même si son père était le gérant réel de la société durant cette courte période.
Claude Chopin "ne pourrait pas avoir un procès équitable" 43 ans après les faits et "aucune infraction ne lui est imputable", avance son avocat, Me Vincent Courcelle-Labrousse.
"Il n'y a pas de volonté de vengeance, pas d'acharnement", estime au contraire Me Jean-Paul Teissonnière, qui défend les salariés, "mais il faut qu'à un moment donné on dise que ce qui s'est passé (dans cette usine) est interdit".
Selon les autorités sanitaires, l'amiante pourrait provoquer jusqu'à 100.000 décès d'ici à 2025, les maladies pouvant survenir jusqu'à 40 ans après l'exposition.