Le salon aéronautique de Farnborough s'achève sur des dizaines de milliards de dollars de commandes, mais reste un cru moyen, marqué par le duopole incontesté Airbus-Boeing, qui a surtout fait recette auprès des sociétés de location d'avions.
"Farnborough 2012 restera comme un petit millésime pour Boeing et Airbus", commente Yan Derocles, spécialiste du secteur chez Oddo Securities.
Les deux géants aéronautiques, l'américain Boeing et l'européen Airbus, se sont arrogés l'essentiel des commandes et intentions d'achats. Pour eux seuls, celles-ci sont estimées à 52,2 milliards de dollars dont 35,3 milliards pour Boeing.
Pour autant, le bilan est loin d'égaler celui du salon du Bourget, près de Paris, l'an dernier: en volume d'avions, ce sont 488 appareils qui ont été commandés cette semaine contre 871 en 2011.
"Nous attendions environ 150 commandes pour le constructeur européen qui quitte finalement le salon avec uniquement 115 avions supplémentaires", ajoute M. Derocles.
"Les prises de commandes ont ralenti dans le secteur car, soit les compagnies aériennes ont déjà renouvelé leur flotte, soit elles sont en difficultés et donc peu enclines aux achats", explique Christophe Menard, analyste chez Kepler Capital markets.
Ce ralentissement a davantage affecté les avionneurs d'appareils régionaux tels que le brésilien Embraer, "qui ont moins de visibilité", ajoute M. Ménard. D'une certaine manière "le salon a mis en lumière leur fragilité", dit-il.
Mais cette relative accalmie ne menace pas les grands constructeurs dont les carnets de commandes sont remplis pour des années si bien que les délais de livraisons ne cessent de se rallonger.
A titre d'exemple, un A320 Neo, le moyen-courrier remotorisé d'Airbus qui promet 15% d'économie de carburant, acheté aujourd'hui ne pourra pas être livré avant 2020, un frein à l'achat pour les compagnies aériennes.
Le rallongement des livraisons ne décourage pas, au contraire, les sociétés de location d'avions.
Face aux transporteurs traditionnels, qui sont frappés par le prix élevé du kérosène dans un secteur concurrentiel et peu rentable, elles disposent de moyens financiers qui leur permettent de miser sur l'accroissement du trafic mondial attendu sur le long-terme.
Boeing et Airbus prévoient une croissance du trafic aérien de 5% par an au cours des deux prochaines décennies.
Les loueurs, qui comptent bien en profiter, s'y préparent ainsi dès maintenant en diversifiant leur portefeuille avec une gamme d'appareils les plus modernes.
"Le fait marquant de ce salon fût, sans aucun doute, le retour des compagnies de leasing sur le devant de la scène avec 60% des commandes en nombre d'appareils chez Boeing et 53% chez Airbus", souligne ainsi Yan Derocles.
Ces sociétés sont généralement associées à un ralentissement du secteur et à l'obtention de rabais importants auprès des avionneurs, explique-t-il.
Mais, "la situation est différente aujourd'hui", dit-il, pointant du doigt les difficultés des compagnies aériennes à accéder au marché de la dette, qui rend "l'option du financement par location attractif".
La société américaine Air Lease Corporation (ALC) a ainsi fait sensation à Farnborough en achetant 75 moyen-courriers 737 MAX, version remotorisée du best seller de l'avionneur américain qui concurrence l'A320 Neo. Une commande estimée à pas moins de 7,2 milliards de dollars.
Le loueur américain CIT est, lui, prêt à débourser jusqu'à 2,3 milliards pour acquérir dix long-courriers A330, dont cinq appareils dans leur version modernisée. L'annonce a été faite mercredi, deux jours, seulement, après que l'avionneur Airbus eût dévoilé son projet d'A330 à plus long rayon d'action.