Le constructeur allemand Audi fête jeudi ses 100 ans en se rêvant numéro un mondial du haut-de-gamme, malgré la crise et les tensions entre sa maison-mère Volkswagen et l'actionnaire Porsche.
Son patron Rupert Stadler l'a encore répété récemment dans la presse: il veut vendre plus de voitures que les deux grands rivaux BMW et Mercedes-Benz (groupe Daimler) d'ici 2015.
Audi se targue d'ailleurs de mieux résister à la crise, avec une chute des ventes moins brutale que la concurrence grâce à des modèles appréciés des clients en Europe et en Chine.
Elle a pourtant très longtemps fait figure de petit poucet du secteur, traînant une image de voitures au design un brin ringard, pour homme sérieux mais pas très créatif.
Fondé en 1909 par l'ingénieur August Horch --"Audi" est la traduction latine de "Horch" ("Ecoute")--, le constructeur a plusieurs fois changé de main, souvent relayé au second plan au sein de groupes plus grands.
Il a par exemple fusionné avec trois entreprises automobiles allemandes en 1932, une démarche à l'origine des quatre anneaux liés, resté l'emblème de la marque.
Entre 1940, date à laquelle Audi est sommé de participer à l'effort militaire du régime nazi, et la fin des années 1960, il a même cessé de produire des voitures.
Il faut attendre son rachat à Daimler-Benz par Volkswagen en 1965 et la ténacité d'un de ses ingénieurs pour que soit conçue en 1968, l'Audi 100, première étape du renouveau du constructeur.
Surtout l'arrivée de Ferdinand Piëch à partir de 1974 accomplira, selon le groupe, la transformation d'Audi "en constructeur innovant techniquement".
Cohéritier de la famille Porsche et ingénieur de génie, M. Piëch a bâti toute sa carrière sur ses succès engrangés chez Audi, devenant finalement son patron, puis le patron de la maison-mère Volkswagen, dont il est encore le président du conseil de surveillance.
Il repositionne la gamme vers le haut-de-gamme, lance le moteur cinq cylindres, la technique turbo... "Piëch a contribué de façon décisive au succès actuel d'Audi", affirme Jürgen Pieper, analyste auto de la banque Metzler.
"Si on regarde 20 ans en arrière, quand il est devenu chef d'Audi, puis chef de VW, il est à l'origine de cette stratégie de mettre Audi au niveau de BMW et Daimler, lui n'a pas eu peur", selon lui.
Audi a ensuite bénéficié, selon l'analyste, d'une "série de bons chefs, dont Martin Winterkorn", passé depuis à la tête de VW.
Crise mise à part, reste une épine dans le pied de la marque: le conflit actuel entre Porsche et sa filiale Volkswagen, dont il détient 51%. Les milliardaires des familles Porsche-Piëch se déchirent depuis des mois sur l'avenir de ces deux groupes automobiles, sur fond de crise financière et d'enjeux de pouvoir.
Jeudi, pour les festivités du centenaire organisées dans la ville bavaroise d'Ingolstadt (sud), siège d'Audi, toutes les parties prenantes de ce feuilleton, dont M. Piëch et son ennemi juré, le patron de Porsche Wendelin Wiedeking, soutenu par Wolfgang Porsche, pourraient se retrouver... le champagne à la main.
La chancelière Angela Merkel est aussi sur la liste des invités et doit prononcer un discours.