La durée de cotisation pour toucher une retraite à taux plein va bien passer à 41,5 ans, à partir de la génération 1955, a annoncé mardi le gouvernement, confirmant un allongement décrié par les syndicats, quelques jours à peine après la fin de la retraite à 60 ans.
C'est "tout simplement l'application de la loi de 2003", a affirmé le ministre du Travail Xavier Bertrand. "Nous ne faisons qu'appliquer les textes", a-t-il souligné sur Europe 1.
M. Bertrand a ajouté qu'il "publierait" un décret en ce sens avant décembre, pour fixer le sort de la génération née en 1955, "parce que c'est logique" et "nécessaire pour préserver l'équilibre de notre système de retraite".
Ces déclarations surviennent à la veille d'un "avis technique" que doit remettre le Conseil d'orientation des retraites (COR) -instance indépendante composée de représentants des partenaires sociaux, des parlementaires et de l'Etat-, dont le contenu a déjà été dévoilé.
Selon des sources concordantes, le COR doit y conclure que la durée de cotisation doit passer à 41,5 ans pour les générations nées à partir de 1955, si l'on applique les règles édictées par la réforme Fillon de 2003.
Cette loi a établi que les gains d'espérance de vie à 60 ans doivent se répartir entre un allongement de la vie professionnelle (pour les deux tiers) et de la retraite (pour un tiers). "Ce principe nous amène à passer aujourd'hui de 41 ans à 41,5 ans", a expliqué M. Bertrand.
En 2010, en présentant sa réforme des retraites, le gouvernement avait évoqué le passage à 41,5 ans mais seulement à l'horizon 2020. Dans l'intervalle, l'Insee a produit de nouvelles projections sur l'espérance de vie, ce qui explique un allongement plus précoce.
Actuellement, cette durée de cotisation est de 40 ans et trois trimestres (pour la génération 1951) et doit passer en 2012 à 41 ans (pour la génération 1952). La réforme des retraites de 2010 a prévu qu'elle passerait ensuite à 41 ans et un trimestre en 2013 (pour les générations 1953 et suivantes).
Mais rien n'était encore décidé pour après, notamment pour la génération 1955, dont le nouvel âge minimal pour liquider la retraite est désormais de 61 ans et huit mois. Un changement des règles de cotisation pour cette génération doit obligatoirement intervenir avant la fin de l'année, par décret.
"A terme, il y aura 62 ans (pour l'âge légal de départ, ndlr) et 41,5 ans de cotisation, les deux en même temps, au moment où en Allemagne, c'est 67 ans et 45 ans, en Espagne, c'est 65 ans", a fait valoir M. Bertrand.
L'allongement de la durée de cotisation est une "double peine", a fustigé Eva Joly, candidate à la primaire d'Europe Ecologie-Les Verts. Pour le PC, il s'agit d'une "mise à sac des retraites".
De son côté, Martine Aubry, candidate à la primaire socialiste pour la présidentielle, a dénoncé "une injustice de plus" pour "une réforme inefficace".
Côté syndical, "ce n'est pas une surprise", selon Danièle Karniewicz, chargée des retraites à la CFE-CGC, pas hostile aux 41,5 ans pour la génération 1955.
"Mais après, est-ce qu'on va pouvoir continuer de dire aux plus jeunes que leur durée de cotisation va continuer d'augmenter, alors qu'ils entrent de plus en plus tard sur le marché du travail?", a-t-elle ajouté.
Le secrétaire général de la CFDT François Chérèque a proposé de "suspendre" une décision qualifiée de "prématurée". "Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement se précipite", a-t-il souligné.
Le Medef a au contraire approuvé ce choix, estimant "essentiel pour l'équilibre du dispositif de maintenir constant le rapport entre le temps de travail et le temps de retraite".