Près de vingt ans après l'implosion de l'URSS, la Berd a souligné vendredi les immenses défis économiques qui restent à surmonter dans les pays de l'ex-bloc socialiste, lors de son assemblée annuelle organisée au Kazakhstan.
La Banque européenne pour la reconstruction et le développement, créée en avril 1991 pour aider les anciens pays communistes à passer à l'économie de marché, a démarré cette réunion qui rassemble ses 61 pays actionnaires en dressant un bilan mitigé de ses deux décennies d'action.
En effet, la croissance de sa région d'intervention (qui regroupe 29 pays allant de l'Europe centrale à l'Asie centrale), attendue autour de 4,5% cette année et la suivante, est loin derrière celle des pays émergents comme la Chine, qui flirte avec les 10%.
"La région fait face à une concurrence accrue pour des investissements de plus en plus rares, et ses performances économiques sont à la traîne par rapport à celles des autres marchés émergents", a affirmé le président de l'institution, Thomas Mirow, devant les délégations.
"La transition prend du temps, et même après deux décennies de dur travail, il faut faire plus pour bâtir les fondements d'une économie de marché moderne, qui fonctionne bien, et une démocratie pluraliste", a-t-il reconnu.
Il a notamment assuré les pays d'Asie centrale, "sur la voie de réformes économiques et démocratiques", de l'aide de la Banque.
Ceux-ci sont notamment très vulnérables aux chocs externes, du fait des déséquilibres criants de leurs économies.
Astana, ville aux immeubles et monuments clinquants, nichée au coeur des steppes de l'Asie centrale où se tient la conférence de la Berd, en est un exemple extrême.
L'argent du pétrole et des minerais dont le Kazakhstan regorge a permis à cette petite bourgade, décrétée capitale en 1997, de se transformer en vitrine ultramoderne pour ce pays de 15 millions d'habitants.
Mais l'économie locale est très peu diversifiée, la plaçant à la merci d'un krach des matières premières. Et si les richesses tirées de l'or noir ont permis un bond du niveau de vie de la population kazakhe, la démocratie reste pour le moment largement de façade dans cette république dirigée depuis l'indépendance par le président tout puissant Noursoultan Nazarbaïev, qui a ouvert solennellement la réunion de la Berd.
De plus, la banque s'alarme de "risques grandissants" qui pourraient faire dérailler la reprise dans les pays de sa zone, loin d'avoir retrouvé son dynamisme d'avant la crise financière.
"Entre les difficultés budgétaires dans les pays développés, les déséquilibres persistants de l'économie mondiale, la spirale des prix alimentaires et des matières premières, et les turbulences liées aux dettes publiques, les risques de régression sont réels", a mis en garde M. Mirow.
Parmi ces menaces, une contagion aux pays d'Europe de l'est de la crise de la dette qui secoue la zone euro semble la plus préoccupante.
La banque estime qu'en cas de déstabilisation sévère des marchés financiers, "la reprise en Europe centrale et orientale se gripperait", et se tient prête à soutenir les banques locales qui se trouveraient à court de liquidités.
Mais l'approche de la banque est elle-même jugée bancale par Bankwatch, une fédération d'ONG est-européennes, qui lui reproche de tout miser sur l'économie et le secteur privé.
"La situation environnementale et démocratique dans certains des pays ne s'améliore pas", souligne à l'AFP Pippa Gallop, une des responsables de l'association, venue à Astana en observatrice.
Pour elle, "le modèle promu par la Berd n'est pas assez stable pour résister à des chocs".