Le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, a confirmé jeudi que la hausse des cotisations retraite patronales serait entièrement compensée et a ouvert le dialogue sur le coût du travail, sans toutefois rassurer le président du Medef.
Au surlendemain de l'annonce de la réforme des retraites qui a déclenché l'ire du patronat, le ministre a été accueilli par un Pierre Gattaz tout sourire, au milieu d'une nuée de journalistes, sur le campus d'HEC à Jouy-en-Josas (Yvelines), qui héberge chaque année l'université d'été de la principale organisation patronale.
"Nous allons avoir un dialogue constructif", promettait jovialement en anglais M. Moscovici au micro d'un média étranger en se dirigeant au côté de son interlocuteur vers une salle où un imposant public d'entrepreneurs attendaient les deux hommes.
Un débat-dialogue très attendu par le patronat, pressé d'en savoir plus sur la compensation des hausses de cotisations retraites et sur les promesses de mesures pour réduire le coût du travail évoquées mardi par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault.
M. Moscovici est vite entré dans le vif du sujet après un discours d'accueil du patron des patrons qui lui a redit son "obsession de l'emploi" et les inquiétudes du patronat sur la compétitivité, "la complexité fiscale et sociale" avant de faire applaudir le ministre à tout rompre "pour avoir eu le courage" d'évoquer récemment un "ras-le-bol fiscal" dans le pays.
"La hausse des cotisations patronales conséquente à la réforme des retraites sera intégralement compensée par une baisse des cotisations famille dès 2014 et pour l'intégralité du mandat", a déclaré M. Moscovici.
Il a ajouté que "les prélèvements obligatoires qui pèsent sur les entreprises (allaient) baisser" précisant que, dans un premier temps, ils "n'augmente(raient) pas dès le projet de loi de finances (PLF) 2014".
"Le CICE ne referme pas le dossier du coût du travail (...) Il faut aller plus loin", a encore estimé le ministre, à propos du crédit d'impôt compétitivité emploi qui permet d'abaisser de 4% en 2014 puis de 6%, soit 20 milliards d'euros par an, le coût du travail pour les entreprises.
M. Gattaz réclame lui un allègement de 100 milliards d'euros au total des charges pesant sur les entreprises, réparti à parts égales entre baisse des impôts et diminution des cotisations sociales.
"Nous allons mener le chantier sur le financement de la protection sociale et notamment sur la branche famille dans la concertation avec tous les partenaires sociaux et avec vous, chefs d'entreprise, au premier chef", a précisé M. Moscovici.
Rendez-vous lundi à Bercy "avec les croissants"
M. Gattaz lui a dit qu'il serait dans son bureau "lundi dès 08H00" et "apporter(ait) les croissants". Une rencontre confirmée à l'AFP par l'entourage de M. Moscovici.
Déçu, M. Gattaz à une nouvelle fois souligné qu'il ne percevait là qu'une "simple compensation" et non une baisse du coût du travail pour doper la compétitivité de la France.
"Acceptez que ce soit une avancée", lui a rétorqué le ministre. "C'est une compensation qui nous fait très peur", a répondu le nouveau président du Medef.
"Je ne suis pas rassuré", a-t-il déclaré à la presse après la rencontre, "Nous avons toujours une certitude de hausse face à une promesse de baisse", a-t-il ajouté.
Il a ironisé sur "la gymnastique intellectuelle extrêmement complexe" de "gestion des impôts et crédits d'impôts successifs". "Allons droit au but et baissons les prélèvements obligatoires", a-t-il dit invoquant "l'urgence de la situation" du fait de la baisse de compétitivité de la France et de son chômage élevé.
"On a l'impression d'être au service de cette sphère publique avec un carnet de chèques ouvert sur les ménages et les entreprises", avait lancé M. Gattaz devant M. Moscovici.
"57% de dépenses publiques dans le Produit intérieur brut, ça ne va pas. Il faut réduire le poids des dépenses publiques dans le PIB, le faire vite et le faire résolument fort", a déclaré pendant le débat le ministre, déclenchant les applaudissements de la salle.