L'Ukraine, retombée en récession fin 2012, aborde l'année en position difficile, peinant à s'accorder avec le Fonds monétaire international (FMI) pour se financer et de nouveau en froid avec la Russie sur le dossier gazier.
Les statistiques officielles ont confirmé cette semaine les prévisions des analystes: cette ex-république soviétique de 46 millions d'habitants a vu son produit intérieur brut (PIB) se contracter pendant deux trimestres de suite pour la première fois depuis 2009.
Le PIB a reculé de 2,7% au quatrième trimestre en glissement annuel, après une baisse de 1,2% au troisième trimestre.
Et sur l'ensemble de l'année, la croissance ne s'élève qu'à 0,2%, contre 5,2% en 2011 et alors que le budget 2012 était bâti sur une prévision de 3,9%.
Des experts ukrainiens mettent notamment en cause la crise que traverse la métallurgie ukrainienne. Cette industrie, qui assure 20% du PIB et 60% des exportations nationales, a vu sa production plonger de 5,2% en décembre.
La politique de la banque centrale, qui a imposé des restrictions sur les liquidités bancaires pour éviter une dépréciation de la devise nationale à l'approche des législatives de fin 2012, est également montrée du doigt par certains.
Les exportations assurant plus de la moitié de son PIB, "l'économie ukrainienne a été durement frappée l'an dernier pas la détérioration des conditions économiques dans le monde", souligne dans une note d'analyse Raiffeisen Bank Aval.
Pour ne rien arranger, la récession fait son retour au moment où le pays fait face à des remboursements record d'emprunts cette année: plus de 9 milliards de dollars dont plus de 6 milliards au FMI.
La Russie dont les importations du gaz ont coûté à Kiev plus de 13 milliards de dollars l'an dernier, vient de verser de l'huile sur le feu. Elle réclame sept milliards de dollars de plus pour du gaz non acheté mais prévu par le contrat, ce que l'Ukraine refuse pour l'instant.
Cette "menace met le gouvernement ukrainien face à un sérieux défi budgétaire. Il lui sera difficile de payer ne serait-ce qu'une partie de cette somme", prévient Eurasia Group, une société spécialisée dans les relations internationales.
Avec son budget déjà déficitaire, l'Ukraine est contrainte d’emprunter davantage. Le gouvernement a déjà déclaré qu'il souhaitait obtenir 15 milliards de dollars du FMI dont une mission se trouve à Kiev depuis mardi.
Mais les négociations ne s'annoncent pas faciles. Le Fonds, qui a déjà suspendu son aide à Kiev en 2011 faute de réformes promises, exige des mesures impopulaires, dont une hausse du prix du gaz pour les ménages et une plus grande flexibilité du taux de changes de la monnaie ukrainienne.
Le Premier ministre Mykola Azarov s'est voulu optimiste, assurant lors d'une récente rencontre avec des médias étrangers que le pays pourrait facilement emprunter sur des marchés. Mais les analystes sont plus réservés.
"Sans le FMI, personne ne leur donnera d'argent à de bonnes conditions", a déclaré à l'AFP Igor Mazepa, fondateur du groupe d'investissement ukrainien Concorde Capital.
Pour lui, le gouvernement n'a pas beaucoup de marge de manœuvre et finira selon toute vraisemblance de se plier aux exigences du Fonds.
Premier signe de compromis, M. Azarov et son chef de la diplomatie Léonid Kojara ont pour la première fois admis ces derniers jours la possibilité d'augmenter les tarifs du gaz pour la population.
Même si Kiev arrive à décrocher l'aide du FMI, "l'année 2013 sera dure pour l'économie ukrainienne (...) et la stagnation économique se poursuivra", prévient Erste Bank, qui table sur une hausse du PIB annuelle de 1,5% du PIB.
"La situation est compliquée, mais gérable", souligne à l'AFP le PDG de Raiffeisen Bank Aval Volodymyr Lavrentchouk. Son établissement prévoit une croissance de 2,5% en 2013, sans exclure un scénario pessimiste de 0,5-1%.