PARIS (Reuters) - Alain Duménil, un homme d'affaire franco-suisse, a porté plainte le 17 janvier contre la Direction générale de la Sécurité extérieure (DGSE), qu'il accuse d'avoir tenté de lui extorquer 15 millions d'euros, a-t-on appris auprès de son avocat.
La plainte vise le service de renseignement pour "détention et séquestration", ainsi que "tentative d'extorsion en bande organisée", a précisé Me Nicolas Huc-Morel à Reuters, confirmant une information du Monde, daté du 24 janvier.
Sollicité par Reuters, le porte-parole de la DGSE n'était pas joignable dans l'immédiat.
Une première plainte avait été classée sans suite car les enquêteurs s'étaient heurtés au secret-défense invoqué par la DGSE, ce qui a incité Alain Duménil à se constituer partie-civile à Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour obtenir la désignation d'un juge d'instruction.
"Monsieur Duménil attend maintenant du juge d'instruction que soit sollicité la déclassification des éléments relatifs à cette opération", a précisé Nicolas Huc-Morel.
Selon une source proche du dossier, le directeur général de la DGSE, Bernard Bajolet, a reconnu que son service avait bien approché Alain Duménil, mais "dans le cadre des missions relevant du secret de la défense nationale".
Selon Le Monde, la justice privilégie l'hypothèse selon laquelle la DGSE aurait eu recours à la manière forte pour récupérer un "trésor de guerre" qu'elle aurait confié, sous forme de placements, à une société dont Alain Duménil est devenu propriétaire.
L'homme d'affaires a été en effet mis en examen pour banqueroute fin 2016, précise le quotidien.
Selon son récit aux enquêteurs, Alain Duménil a été intercepté par la Police aux frontières (PAF) sur la passerelle d'un avion, le 12 mars 2016 à l'aéroport de Roissy, et conduit dans une pièce où on lui a demandé d'attendre.
Là, deux hommes en civil et armés, se disant mandatés par l'Etat français, lui auraient reproché d'avoir "volé à l'Etat" 13 millions d'euros, soit 15 millions avec les intérêts.
Les inconnus auraient ensuite indiqué à l'homme d'affaires la procédure à suivre pour restituer cet argent en le menaçant d'attenter à son intégrité physique ou à celle de ses proches.
Bien décidé à ne pas se laisser faire, Alain Duménil aurait indiqué sa volonté de dénoncer les faits au procureur, ce qui aurait incité les inconnus à quitter la pièce d'un pas rapide.
Selon Le Monde, le directeur de la PAF de Roissy a confirmé aux enquêteurs que des sous-officiers de la DGSE lui avaient demandé d'intercepter l'homme d'affaires en affirmant que l'affaire était "suivie au plus haut sommet de l'Etat".
(Gérard Bon, édité par Yves Clarisse)