Pour sa réforme de la fiscalité du patrimoine, le gouvernement a finalement tranché en faveur d'un simple aménagement de l'ISF, le scénario le plus consensuel au sein de la majorité, en décidant notamment de taxer plus lourdement les successions pour la financer.
Lors d'une ultime réunion mardi à Bercy sur le sujet avec les parlementaires de la majorité, le ministre du Budget François Baroin leur a soumis le schéma retenu: en plus de la suppression du bouclier fiscal, déjà décidée, un maintien de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), avec un seuil d'entrée relevé à 1,3 million d'euros de patrimoine.
Entre 1,3 et 3 millions d'euros, le taux d'imposition sera de 0,25% et les redevables de cette tranche déclareront leur patrimoine dans leur déclaration de revenu.
Au-delà de 3 millions de patrimoine, le taux d'imposition sera de 0,5% et les assujettis auront à remplir une déclaration d'ISF comme aujourd'hui.
Jusqu'ici les taux d'imposition évoluaient entre 0,55% et 1,8%.
Comme l'avait dit début mars le gouvernement, cette réforme devrait permettre à 300.000 contribuables, souvent redevables de l'ISF à cause de la flambée des prix de l'immobilier, de ne plus y être assujettis.
"Avec cette mesure, nous évitons en outre à 200.000 autres ménages sur le point de basculer dans l'ISF, ou susceptible d'y entrer dans les prochaines années", a dit François Baroin dans un entretien au Figaro de mercredi.
Côté calendrier, le gouvernement espère appliquer la réforme "dès 2011 pour les assujettis à la première tranche d'ISF", a déclaré le ministre.
Devant l'opposition d'une grande partie des parlementaires de la majorité, le gouvernement a donc renoncé à l'autre scénario, présenté début mars, qui impliquait la suppression de l'ISF et son remplacement par un nouvel impôt du patrimoine.
Un député UMP s'est réjoui mardi auprès de l'AFP d'une "réforme importante et compétitive économiquement parce qu'elle évite de faire de l'ISF un impôt dissuasif pour les Français les plus aisés".
Pour financer la réforme, l'Etat devait trouver 900 millions d'euros. Son coût total est en effet évalué à 1,7 milliard d'euros mais le gouvernement va récupérer 800 millions d'euros grâce à la suppression du bouclier fiscal et du plafonnement de l'ISF.
Parmi les pistes un temps évoquées, il a renoncé à taxer l'assurance-vie des plus aisés. Pas question non plus de créer une tranche d'impôt sur le revenu supplémentaire à 45%, pourtant plébiscitée par plusieurs parlementaires.
En revanche, les successions de plus de quatre millions d'euros seront plus lourdement taxées et concernant les donations, le gouvernement veut rallonger de 6 à 10 ans le délai donnant droit à abattement, et supprimer des avantages en fonction de l'âge auquel elle est effectuée.
Est aussi prévue une taxation forfaitaire des résidences secondaires pour les non-résidents et une "exit tax" sur les exilés fiscaux. "Si un contribuable part en Belgique pour céder son entreprise, il devra payer l'impôt en France sur la valeur du bien estimée par l'administration fiscale", a expliqué un député UMP.
L'"exit tax" s'appliquera "dès cette année", selon M. Baroin.
"L'ensemble des mesures proposées ne font pas objection au sein de la majorité mais on peut imaginer qu'il y aura des ajustements lors du débat parlementaire, y compris sur l'assurance-vie ou le relèvement de l'imposition pour les plus hauts revenus", a dit le député UMP Michel Piron.
La réforme doit être présentée en Conseil des ministres le 11 mai pour être débattue début juin à l'Assemblée nationale et fin juin au Sénat.