Lot de consolation après avoir échoué à la présidence de l'UE, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker devrait être reconduit lundi comme chef de file des ministres des Finances de la zone euro, avec pour objectif de renforcer la coordination des politiques économiques.
La décision devrait être prise à l'occasion d'une réunion à Bruxelles de l'Eurogroupe. M. Juncker, qui cumule les fonctions de Premier ministre et de ministre du Trésor dans son pays, se verra sauf surprise adoubé pour un nouveau mandat de deux ans et demi.
Il préside ce forum depuis déjà janvier 2005. Vétéran des réunions européennes --il est Premier ministre du Luxembourg depuis 1995 -- il avait été reconduit à la présidence de l'Eurogroupe en 2008 pour un mandat de deux ans s'achevant fin 2010.
Mais l'entrée en vigueur en décembre dernier du traité de Lisbonne a changé la donne en formalisant l'existence du forum, et en fixant à deux ans et demi le mandat de son président, ce qui a fait repartir les compteurs à zéro.
M. Juncker a vu le principal obstacle à sa reconduction levé cette semaine lorsque le ministre des Finances italien, Giulio Tremonti, cité comme un potentiel concurrent, a dit ne pas être intéressé.
Il a aussi reçu le soutien de la présidence espagnole de l'UE et de Paris, alors que l'intérêt pour le poste de la ministre française de l'Economie, Christine Lagarde, fut un temps évoqué.
Cette nomination sera pour lui un pis-aller, alors qu'il ambitionnait de devenir le premier président permanent de l'Union européenne. Un poste finalement attribué le 19 novembre au Belge Herman Van Rompuy.
Selon l'entourage de M. Juncker, c'est le président français Nicolas Sarkozy qui a fait blocage, reprochant au Luxembourgeois sa passivité face à la crise financière et ses réticences pour mettre totalement fin au secret bancaire dans son pays.
M. Juncker en a été visiblement meurtri. "Certains dirigeants n'ont pas voulu m'accorder leur confiance", a-t-il regretté récemment.
Il a rencontré jeudi pour la première fois le président français en tête-à-tête depuis ces tensions. "Après tout ce qu'il y a eu, l'atmosphère fut bonne", a-t-il lâché.
Toutefois, la prolongation de M. Juncker aux manettes de l'Eurogroupe ne s'annonce pas comme un chèque en blanc, car on attend de lui plus que par le passé, au moment où il faut gérer la réduction des déficits européens et relancer la croissance.
La France et d'autres pays entendent qu'il promeuve plus efficacement l'idée d'une gouvernance économique commune de la zone euro. Concept que M. Sarkozy a résumé sous le terme controversé de "gouvernement" de la zone euro.
Dans une lettre envoyée aux ministres des Finances et détaillant ses priorités, M. Juncker va dans ce sens.
Il estime que l'Eurogroupe devrait mener une "surveillance économique élargie", au-delà des questions budgétaires, et que la Commission européenne "ne devrait pas hésiter (...) à adresser une mise en garde" à un Etat, si ses actions ne sont pas en accord avec les "lignes directrices" définies pour la zone euro.
Les ministres des Finances devraient ensuite avoir "une franche discussion avec l'Etat membre concerné, afin de s'assurer que des mesures efficaces sont prises", ajoute-t-il.
La présidence espagnole de l'UE a également indiqué vouloir promouvoir la création d'une forme de "gouvernement" économique européen, avec la menace de sanctions financières pour les pays récalcitrants.
M. Juncker souligne par ailleurs vouloir améliorer la représentation de la zone euro dans les instances internationales, comme le Fonds monétaire international et le G20.