Décidée à contrer l'offensive du français Lactalis sur Parmalat, Rome a sorti une nouvelle arme en annonçant la création d'un fonds d'investissement qui, sur le modèle du FSI français, pourra acquérir des parts dans les groupes stratégiques pour les défendre.
"Le conseil des ministres a autorisé le ministre de l'Economie et des Finances à mettre en place et activer des instruments de financement et de capitalisation, analogues à ceux existant dans d'autres pays européens", a indiqué jeudi le gouvernement dans un communiqué.
Ces instruments serviront "à acquérir des participations dans des sociétés d'intérêt national en termes de caractère stratégique du secteur ou d'emploi. Parmalat est inclus dans cette catégorie", a-t-il ajouté.
Selon une source proche du dossier, Rome veut créer un bras financier inspiré du Fonds Stratégique d'Investissement (FSI) français et qui, comme en France, devrait reposer sur la Caisse des dépôts italienne.
Annoncée fin 2008, en pleine crise, la création du FSI, détenu à 51% par la Caisse des dépôts et à 49% par l’Etat français, visait à sécuriser le capital d'entreprises stratégiques et soutenir le développement des PME.
Le FSI s'est illustré récemment par le rachat d'activités de l'ex-Pechiney et la reprise des 10,4% du groupe nucléaire Areva dans STMicroelectronics. Il pourrait également entrer au capital de Yoplait, dont la majorité va être rachetée par l'américain General Mills.
Cette mesure n'est pas la première annoncée par l'Italie pour défendre ses joyaux économiques.
Le 23 mars, au lendemain de l'annonce de la montée de Lactalis à 29% de Parmalat, le gouvernement avait adopté un décret permettant aux entreprises de repousser leur assemblée générale jusqu'à fin juin.
L'objectif est de donner plus de temps à la formation d'une alliance d'investisseurs italiens pour contrer Lactalis qui avec 29% pourrait prendre le contrôle du groupe lors de l'assemblée. Lactalis a dénoncé cette mesure qui "change les règles du jeu en cours de route".
Parmalat réunit vendredi son conseil d'administration afin de repousser éventuellement son assemblée qui a été convoquée pour les 12, 13 ou 14 avril.
La banque Intesa Sanpaolo, qui détient 2,4% de Parmalat, travaille donc à la mise sur pied d'ici vendredi d'une alliance italienne afin de donner à Parmalat une raison de repousser son assemblée.
Ferrero est toujours officiellement prêt à entrer dans la partie même si selon la presse son intérêt aurait décliné. Selon une source proche, la Caisse des dépôts italienne pourrait participer à une alliance de façon autonome avant que le fonds stratégique ne soit constitué.
A la Bourse de Milan, Parmalat a clôturé en tête de l'indice vedette FTSE Mib en prenant 1,20% à 2,364 euros.
L'offensive de Lactalis sur Parmalat a été pour Rome la goutte faisant déborder le vase, les manoeuvres françaises s'étant multipliées récemment dans la Péninsule avec le rachat de Bulgari par LVMH et les négociations entre EDF et les actionnaires italiens sur le contrôle d'Edison.
Lactalis a indiqué jeudi qu'il avait informé la Commission européenne des "développements de son entrée au capital" mais ne l'avait pas prévenue avant de procéder à cette acquisition car elle ne pouvait "pas être considérée comme une prise de contrôle", selon le groupe.
Tentant de rassurer face à la levée de boucliers, le groupe répète qu'il est prêt à discuter avec tous les actionnaires et qu'il n'a aucune intention de démanteler le groupe ou de délocaliser.