La survie de l'usine historique Mirafiori de Fiat à Turin (nord) était suspendue dans la nuit de vendredi à samedi au résultat du vote des salariés sur un accord durcissant les conditions de travail, considéré comme un tournant dans l'histoire sociale du pays.
Selon une source syndicale, vers 23H30 GMT, seulement un quart des bulletins avaient été dépouillés et le non disposait d'une légère avance. Le résultat définitif ne sera pas connu avant le milieu de la nuit.
Le vote des 5.431 salariés de l'usine, qui avait débuté jeudi à 21H00 GMT, s'est achevé vendredi vers 18H30 GMT. La participation s'est élevée à 96%.
A l'exception de la Fiom - branche métallurgie de la CGIL (gauche), premier syndicat du pays, qui dénonce un "chantage", tous les syndicats ont signé cet accord le 23 décembre.
"Pour l'emploi, les salaires et les droits, votons oui", "Non au chantage de (Sergio) Marchionne", le patron de Fiat: les affiches des syndicats devant l'usine ont appelé les salariés à choisir leur camp.
Si le oui l'emporte, Fiat investira plus d'un milliard d'euros avec son partenaire américain Chrysler pour produire jusqu'à 280.000 Jeep et Alfa Romeo par an.
En cas de non, le groupe produira ces véhicules aux Etats-Unis ou au Canada, et faute de nouveaux modèles, Mirafiori ira vers une fermeture assurée.
Cet accord, qui prévoit un contrat spécifique pour les ouvriers de Mirafiori qui ne dépendront donc plus de la convention collective de la métallurgie, est considéré comme un tournant sans précédent en Italie.
"Les bulletins de vote qui depuis hier sont glissés dans les urnes de l'usine sont destinés à changer l'histoire industrielle du pays", juge le quotidien économique Il Sole 24 Ore.
Possibilité de faire tourner l'usine 24h/24 et jusqu'à six jours par semaine, réduction des pauses, triplement du nombre maximum d'heures supplémentaires à 120 par an: cet accord durcit les conditions de travail.
Des sanctions sont prévues en cas d'absentéisme "anormal" ou de grève contre l'accord. Point très controversé, la Fiom ne pourra plus avoir de délégués dans l'usine car elle a refusé de signer.
Mais les salaires augmenteront jusqu'à 3.700 euros bruts par an grâce au travail de nuit et aux heures supplémentaires, font valoir les syndicats signataires.
Un référendum sur un accord similaire à l'usine de Pomigliano (sud) avait recueilli 62% d'adhésion en juin mais le vote de Mirafiori suscite plus de passions car Turin est la ville où Fiat est né et Mirafiori son coeur industriel.
Soutenu par le gouvernement, le patronat et une partie de la gauche, l'accord de Mirafiori divise la péninsule. Signe de tension, des étoiles rouges, symbole des Brigades rouges, sont apparues ces derniers jours sur les murs de plusieurs villes du pays.
Le chef du gouvernement Silvio Berlusconi a affirmé vendredi penser que le "bon sens" l'emporterait, après avoir estimé mercredi qu'en cas de victoire du non, les entreprises "auraient de bonnes raisons d'aller dans d'autres pays".
Pour Sergio Marchionne, qui veut faire de l'alliance Fiat-Chrysler un géant mondial de l'automobile, ce type d'accord est indispensable pour que les usines italiennes soient plus productives et arrêtent de perdre de l'argent.
Le patron italo-canadien, qui aime à souligner que les 6.100 salariés de Fiat en Pologne produisent le même nombre de voitures que les 22.000 salariés italiens, en a fait une condition sine qua non à l'investissement de 20 milliards d'euros d'ici 2014 en Italie pour y doubler la production.