Conforté par le soutien du président, le Premier ministre portugais s'est engagé lundi à garder le cap de l'austérité afin de restaurer la confiance après une crise politique qui a fait douter de la réussite du programme de redressement financier du pays.
A peine remis en selle après trois semaines d'incertitude, Pedro Passos Coelho a défendu la politique de rigueur qu'il mène sous la tutelle de ses créanciers internationaux en échange du prêt de 78 milliards accordé en mai 2011.
Loin de la juger excessive, comme le lui reprochent l'opposition de gauche voire même son partenaire de coalition, M. Passos Coelho a estimé que l'austérité était simplement "celle que nous imposent les circonstances".
Confirmant sa volonté de poursuivre dans la même voie, il a souligné la nécessité de promouvoir des "réformes profondes" et de "reconstruire la confiance en levant les doutes sur notre volonté de conclure notre programme d'assistance à la date prévue", en juin 2014.
Le Premier ministre est intervenu au lendemain de la décision du président Anibal Cavaco Silva de lui renouveler son appui, et de refuser les élections législatives anticipées que l'opposition de gauche réclame.
Le président avait souhaité dans un premier temps que les deux partis de la coalition au pouvoir et les socialistes concluent un "pacte de salut national". Mais cette proposition s'est soldée par un échec retentissant.
Même tardif, le soutien du président a été accueilli avec satisfaction par les marchés. Le taux d'emprunt à 10 ans du Portugal enregistrait une nette détente lundi matin, tandis que la Bourse de Lisbonne gagnait plus de 2%.
Les atermoiements de M. Cavaco Silva lui ont valu en revanche de sévères critiques au Portugal.
"Tout va rester comme avant alors que le pays a besoin d'un nouveau cap", a dit Alberto Martins, chef de la délégation du PS aux négociations avec les deux partis de la coalition.
Un gouvernement sous surveillance
Le président devrait vraisemblablement donner également son aval au remaniement ministériel que M. Passos Coelho lui a proposé.
Le Premier ministre a en effet décidé de promouvoir au rang de vice-Premier ministre Paulo Portas, chef du parti conservateur CDS-PP, dont la démission de son poste de ministre des Affaires étrangères avait déclenché la crise et mis en péril la survie de la coalition.
M. Cavaco Silva semble toutefois avoir mis le Premier ministre sous surveillance. "Je n'abdiquerai aucun des pouvoirs que la Constitution m'attribue", a-t-il dit, alors qu'il a toujours la possibilité de convoquer des élections législatives anticipées, même si son rôle est essentiellement protocolaire.
Le gouvernement "est maintenant sous la tutelle du président, en plus de celle dela 'troïka' (des créanciers), ce qui crée une instabilité permanente", a commenté le quotidien Diario de Noticias.
En raison de la crise politique, la troïka (UE-FMI-BCE) a accepté de repousser jusqu'à fin août, début septembre sa prochaine évaluation des comptes du pays.
L'examen s'annonce d'autant plus ardu que le gouvernement s'est engagé à ramener d'ici la fin de l'année le déficit public à 5,5% du PIB. En raison des difficultés qu'il traverse, il pourrait demander un nouvel allégement de ses objectifs, le troisième depuis la mise en oeuvre du plan de sauvetage.
"A priori, la troïka devrait continuer de se montrer satisfaite des efforts de consolidation budgétaire du Portugal", a toutefois estimé René Defossez, stratégiste chez Natixis.
Le gouvernement doit également présenter aux bailleurs de fonds une réforme de l'Etat destinée à réduire les dépenses publiques de 4,7 milliards d'euros, un projet qui suppose des coupes drastiques susceptibles d'alimenter le mécontentement populaire.
"Le peuple portugais ne restera pas passif et toutes les formes de lutte sont possibles", a averti le chef de la CGTP, le principal syndicat portugais.