par Caroline Pailliez
PARIS (Reuters) - Les organisations patronales et syndicales ont redit mardi leur opposition à une réforme des retraites avant l'élection présidentielle, un scénario envisagé par Emmanuel Macron pour marquer la fin du quinquennat et redresser les finances du régime, fortement éprouvées par la crise sanitaire.
Syndicats et organisations patronales se sont entretenus avec le chef de l'Etat pour "faire le point sur la situation économique et sanitaire après plus d’un an de crise", selon les termes de l'Elysée. Ils ont abordé le dossier des retraites, suspendu en mars 2020 à la faveur du premier confinement.
Ce chantier socialement explosif a été relancé début juin par Emmanuel Macron, qui a ouvert la porte à de nouvelles mesures "dans les mois qui viennent", possiblement à l'automne.
Parmi les options envisagées figure le relèvement de l'âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans et une augmentation des petites retraites.
"On est favorable à une réforme de retraites qui prenne la seule mesure qui soit vraiment significative qui est la mesure d'âge, (...) mais on s'interroge sur le bon timing surtout avec le variant Delta et la recrudescence (de l'épidémie)", a dit le président du Medef Geoffroy Roux de Bézieux à l'issue des discussions.
"Alors qu'on a grand espoir de pouvoir redémarrer une activité normale (...), on ne veut pas rajouter à la cacophonie", a dit pour sa part le président du syndicat des artisans (U2P), Dominique Métayer, face au spectre de nouvelles mobilisations.
La CFDT et la CFTC, qui avaient soutenu toutes deux l'idée de mettre en place un régime de retraite universel par points, ont réitéré leur refus d'une réforme paramétrique.
"Nous avons dit que, si l'idée d'un système des retraites plus juste était encore d'actualité pour nous, il n'y avait pas de voie de passage de toute façon sur une mesure purement paramétrique à l'automne prochain et que ça nous paraissait totalement hors de propos dans cette période", a dit le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger.
Il avait brandi plus tôt la menace de mobilisations à la rentrée si jamais la mesure était avancée par le gouvernement.
"Le vrai sujet, après la crise sanitaire que nous venons de traverser (...) est de relancer, rassembler et accompagner les personnes les plus en difficulté", a-t-il ajouté.
"LOIN D'ETRE EN FAILLITE"
La CFE-CGC, Force ouvrière et la CGT estiment pour leur part que le régime actuel est "loin d'être en faillite" et poussent plutôt pour des mesures encourageant l'emploi, notamment des seniors.
"Si vous reculez l'âge de départ à la retraite brutalement (...), ça ferme la porte à l'entrée dans l'emploi de ceux qui cherchent à y entrer, les jeunes notamment, et met en difficulté les seniors qui ne sont déjà plus en emploi", a dit le patron de Force ouvrière Yves Veyrier.
Pour le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, il faut travailler sur le financement des régimes de retraites avec une augmentation des cotisations sociales, ce qui signifie "moins de privés d'emploi" et "plus d'actifs", ainsi que moins "d'exonérations de cotisations patronales".
Face aux objections des partenaires sociaux, le président de la République a répondu "qu'il allait réfléchir, consulter et qu'il s'exprimerait la semaine prochaine", selon Philippe Martinez.
Réforme ou non, le chef de l'Etat a également dit que les prochains mois qui le séparaient de l'élection présidentielle ne devaient pas être "inutiles" et a souhaité que les partenaires sociaux et le gouvernement reprennent les discussions sur ce dossier, a précisé Cyril Chabanier de la CFTC.
Le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a précisé dimanche dernier que le chef de l'Etat s'exprimerait "probablement" avant le 14 juillet.
La présidence n'a pas souhaité donner de précisions sur la teneur des échanges de mardi.
(Reportage Caroline Pailliez, avec la contribution d'Elizabeth Pineau, édité par Sophie Louet)