Le PDG de SFR, Frank Esser, a été mis sur la touche lundi, faisant les frais de l'arrivée tonitruante de Free sur le marché français de la téléphonie mobile, qui a accentué la perte de vitesse du deuxième opérateur télécoms hexagonal.
Frank Esser a quitté ses fonctions en "total accord avec le conseil de surveillance", a assuré la maison mère, le groupe Vivendi, en annonçant que ses fonctions seraient reprises par le président de son directoire, Jean-Bernard Lévy.
Le départ de cette figure du secteur, à la tête de SFR depuis dix ans, était pressenti depuis le 1er mars, quand M. Lévy avait annoncé sa volonté de resserrer les boulons dans la gestion de l'opérateur lors de la présentation de ses résultats annuels.
Le patron de Vivendi s'était alors longuement apesanti sur la nécessité d'"adapter" l'organisation de SFR à la "nouvelle donne" créée par l'arrivée de Free et de "redéployer son dispositif".
SFR avait déjà souffert en 2011, accusant un recul de plus de 3% de ses ventes qui ont totalisé 12,18 milliards d'euros, lié à la majoration de la TVA dans les télécoms.
L'arrivée tonitruante de Free (Iliad), quatrième opérateur français sur le marché, lui a porté un coup supplémentaire en avivant la guerre des prix.
Sur une base de 21 millions de clients, SFR en a perdu au total quelque 200.000, soit environ 1%, au cours des mois de janvier et février, correspondant aux deux premiers mois d'activité de Free.
Il n'est pas le seul dans ce cas. Les deux autres opérateurs "installés", Orange et Bouygues Telecom, ont eux aussi pâti du phénomène. Selon les estimations de Bouygues, Free Mobile disposerait aujourd'hui d'une clientèle de 2,2 millions de personnes.
Mais du fait de cette concurrence nouvelle, à laquelle il entend répondre par une poursuite de ses baisses de tarifs, SFR s'attend cette année à un net repli de 12 à 15% de son résultat brut d'exploitation. Ce qui a amené début mars Jean-Bernard Lévy à évoquer un réexamen "systématique" des coûts, "tant sur les investissements que sur l'exploitation".
Frank Esser paie-t-il dans ce contexte un excès de candeur? Auditionné à l'Assemblée nationale en février, il s'était dit "sincèrement étonné par l'agressivité" des offres à bas coûts de Free et s'était interrogé sur la "pérennité de ces innovations tarifaires".
Il avait en outre estimé que plusieurs "questions-clés" se posaient sur l'accord d'itinérance conclu par Orange et Free, "parce que pour moi, financer la fréquence 4G à deux euros par mois (allusion à une offre de forfait de Free), c'est impossible!", s'était-il exclamé.
Selon Les Echos et La Tribune, Jean-Bernard Lévy ne devrait assurer qu'un intérim à la tête de SFR, le temps pour Vivendi de trouver un remplaçant idoine à M. Esser.
Les Echos indiquent ainsi sur leur site internet qu'un cabinet de chasseurs de tête aurait été nommé pour trouver un successeur à plus long terme.
Selon le quotidien, plusieurs noms circulent déjà, dont ceux de Didier Quillot (ex-président de Lagardère Active et d'Orange France au début des années 2000), Gilles Pélisson (ex-directeur général de Bouygues Telecom), Olivier Huart (directeur général de TDF), Jean-Marc Tasseto (directeur général de Google France, ex-directeur marketing de SFR), et Michel Combes (directeur général Europe de Vodafone).
"Bertrand Méheut, le patron de Canal + aurait fait une offre de services qui a été déclinée par Vivendi", ajoute Les Echos.