Démocrates et républicains se rejetaient dimanche la responsabilité de l'abaissement de la note de la dette américaine, sourds au message d'unité de la Maison Blanche, dont l'artisan des réformes économiques, Timothy Geithner, a annoncé son maintien en poste.
Le secrétaire au Trésor "a fait savoir au président qu'il comptait rester à son poste", a affirmé son ministère dans un communiqué. Cette décision a été aussitôt "saluée" par Barack Obama, a dit la Maison Blanche.
Le maintien en fonctions de M. Geithner, dont la démission avait été demandée samedi par des élus républicains, pourrait constituer un gage de stabilité au moment où l'incertitude plane sur les marchés financiers, en particulier Wall Street, dont l'ouverture sera au centre des attentions lundi matin.
En attendant, la perte du "AAA" attribué par l'agence d'évaluation financière Standard and Poor's a fait l'effet d'une bombe au sein de la classe politique américaine.
Le sénateur démocrate John Kerry a estimé que la dégradation était la conséquence des tentatives de blocage de certains républicains lors des débats sur le relèvement du plafond de la dette.
"C'est dégradation, c'est celle du tea party", a-t-il lancé à l'endroit du mouvement ultraconservateur. "Ce dont nous avons besoin ici à Washington, c'est d'arrêter nos empoignades", a-t-il dit sur la chaîne NBC.
Riposte immédiate, sur le même plateau, du sénateur républicain John McCain: "Je suis d'accord sur le fait que notre système souffre de dysfonctionnements, mais qui viennent en bonne partie de l'échec du président à diriger le pays".
Ces prises de bec interviennent malgré le message d'unité lancé par la Maison Blanche aux responsables politiques. Barack Obama, a dit samedi la présidence américaine, "pense qu'il est important que les élus s'unissent pour renforcer l'économie et rétablir la situation budgétaire".
Le sénateur McCain a également pris la défense de S&P face aux accusations de l'administration Obama, selon qui l'agence d'évaluation financière avait commis une "erreur" dans ses projections.
"Ne tirez pas sur le messager, a dit McCain. "Y a-t-il vraiment quelqu'un qui croie que S&P se trompe dans son évaluation de la situation budgétaire de ce pays?"
L'ancien conseiller économique du président Obama, Lawrence Summers, a estimé pour sa part qu'il était "inutile" de tomber sur le dos de l'agence d'évaluation, "même s'ils le méritent en partie" et que l'abaissement de la note américaine accentue "le risque de récession".
"Il faut plutôt se concentrer sur ce que nous pouvons faire pour aller de l'avant", a-t-il déclaré sur CNN.
Face aux critiques dont elle fait l'objet, Standard and Poor's a de nouveau justifié sa décision dimanche par la voix du président de son comité de notation des Etats, John Chambers.
"Les gens finiront par s'apercevoir que le rang des Etats-Unis en tant qu'emprunteurs n'est vraiment pas tout à fait le même que les pays que nous notons AAA", a-t-il assuré sur la chaîne ABC, où il était présenté comme étant potentiellement "la plus personne la moins aimée aux Etats-Unis".
Il a ajouté que la note des Etats-Unis ne devrait pas bouger dans l'immédiat, sauf "si l'état des finances publiques des Etats-Unis se dégrade encore ou si le blocage politique devient encore plus insoluble".
"Techniquement parlant (l'économie américaine) n'est pas sous surveillance. Nous avons une perspective négative, qui donne un cadre temporel plus long, de 6 à 24 mois", a expliqué le dirigeant de S&P.
Dans le langage de l'agence, "la perspective indique qu'il y a au moins une chance sur trois que la note soit abaissée sur cette période".
Pour Lawrence Summers, "S&P a constaté ce que les Américains ont ressenti, leur colère face aux solutions proposées par le Congrès pour régler des problèmes économiques cruciaux".