Goldman Sachs a confirmé mardi son statut de banque phare de Wall Street en affichant des résultats en forte hausse et largement supérieurs aux attentes, profitant à plein de la disparition ou de la prudence nouvelle de ses rivales après la crise financière.
La banque d'affaires américaine a publié un bénéfice net de 3,44 milliards de dollars pour le deuxième trimestre, représentant un bond de 65% sur un an et de 89% par rapport au premier trimestre.
Ce résultat s'entend après déduction du dividende de 426 millions versé à l'Etat fédéral pour rémunérer les 10 milliards de fonds publics avancés à l'automne (et depuis lors remboursés). La banque a aussi dû passer pour 700 millions de dépréciations sur son portefeuille d'immobilier commercial.
Rapporté par action, mesure de référence des analystes, le bénéfice de Goldman "a dépassé de 1,39 dollar le consensus du marché, ce qui est beaucoup", souligne Cesare de Novellis, analyste chez Meeschaert New York. Il s'est établi à 4,93 dollars - et même à 5,71 dollars en excluant la rémunération de l'Etat - contre 3,54 dollars attendus par les analystes.
La croissance de la rentabilité de Goldman Sachs a été encore plus rapide que celle de son chiffre d'affaires, qui a bondi de 46% sur un an.
Le produit net bancaire s'est élevé à 13,76 milliards de dollars, contre un consensus de marché de 10,66 milliards, tiré par les 10,78 milliards de revenus dégagés dans la division courtage - marchés actions et obligataires - en croissance de 93% sur un an et de 51% sur le premier trimestre.
Contrastant avec cette performance, la banque d'investissement a vu ses revenus reculer de 15% sur un an et la banque privée de 28%.
Le PDG Lloyd Blankfein a expliqué ces résultats par l'amélioration constatée sur les marchés financiers, en dépit d'un environnement encore "fragile". Au cours de la période sous revue, l'indice Dow Jones a connu sa meilleure performance trimestrielle en six ans.
Le directeur financier David Viniar a fait valoir que Goldman a profité "de marchés et de produits très liquides", sur lesquels la banque a appliqué sa culture de gestion du risque pour "saisir" les opportunités.
"Pour chaque dollar que nous allons chercher, il y a assurément moins de compétition", a-t-il aussi indiqué, lors d'une conférence téléphonique.
Pour autant, l'action Goldman Sachs réagissait peu à la Bourse de New York - +0,68% à 150,45 dollars -, les bons résultats "ayant déjà été anticipés par le marché", expliquait Jon Ogg, analyste du site 24/7 Wall Street.
La veille, l'une des analystes les plus écoutées de Wall Street, Meredith Whitney, avait relevé sa recommandation sur le titre, alors qu'elle est célèbre pour son pessimisme envers le secteur bancaire. Sa décision avait permis au titre de clôturer en hausse de plus de 5%.
Plusieurs observateurs saluaient mardi la solidité du modèle Goldman.
"Le fait que Goldman annonce aujourd'hui le versement d'un dividende de 35 cents par action, payable en septembre, est une preuve de leur confiance dans la solidité de leur situation financière", estime M. De Novellis, pour qui "Goldman va rester la meilleure banque d'affaires" à l'avenir.
Charles Geisst, professeur d'économie et historien de Wall Street au Manhattan College, fait valoir que les performances de Goldman tiennent à une combinaison de deux facteurs.
"Il y a moins de concurrents sur le marché" depuis l'implosion de l'année dernière qui a vu Bear Stearns et Lehman Brothers disparaître et Merrill Lynch se faire avaler par Bank of America, une société à la culture beaucoup plus conservatrice. Morgan Stanley, l'autre grande banque d'affaires survivante, a de son côté délibérément choisi de renoncer aux opérations les plus risquées.
Cela donne à Goldman Sachs "plus de latitude dans le courtage et les opérations de souscription", ajoute M. Geisst.
"Par ailleurs, leur appétit pour le risque n'a jamais diminué, si bien qu'ils sont en mesure de prendre l'avantage", là où les autres concurrents renouent doucement avec la culture du risque, poursuit l'historien.
Toutefois Goldman Sachs "pourrait bien ne pas briller autant à l'avenir, lorsque la concurrence se ressaisira", avance-t-il.