Une réunion cruciale de chefs de cinq des sept partis grecs élus le 6 mai a commencé mardi sous l'égide du président de la République Carolos Papoulias pour tenter de former un exécutif de "personnalités", dernière chance pour sortir le pays de l'impasse politique qui menace de l'éjecter de la zone euro.
Paralysé politiquement depuis les législatives du 6 mai qui n'ont pas dégagé de majorité, le pays tente désespérément de mettre sur pied un gouvernement prenant en compte le désaveu total des Grecs vis-à-vis des politiques d'austérité mises en place à la demande des créanciers du pays, tout en évitant une sortie de la monnaie unique.
Le Président, âgé de 82 ans, a reçu à la résidence présidentielle le dirigeant conservateur de la Nouvelle-Démocratie, Antonis Samaras, les chefs du Pasok socialiste Evangélos Vénizélos, de la Gauche radicale Syriza, Alexis Tsipras, de la Gauche démocratique, Fotis Kouvelis et de la petite formation nationalo-populiste Grecs indépendants, Panos Kammenos.
Son objectif est de les mettre d'accord pour un gouvernement composé de "personnalités non politiques" qui aurait le soutien d'au moins 151 députés sur les 300 que compte le parlement.
Après l'échec des tentatives depuis neuf jours de mettre d'accord les chefs de partis, M. Papoulias a proposé lundi soir la formation d'un gouvernement constitué "de personnalités", face au "danger" pesant sur le pays, dont l'instabilité inquiète ses partenaires européens.
Aucun détail n'a été donné sur le nom de celui qui pourrait mener un tel gouvernement. Le pays est dirigé depuis novembre par l'ex-banquier central Lucas Papademos qui avait laissé filtrer dans les médias ces derniers jours qu'il n'était pas disposé à poursuivre sa mission.
La Constitution ne limite pas le temps donné à M. Papoulias pour tenter d'arracher un accord des chefs politiques à son projet, mais le délai expirera de fait à la formation, jeudi, du nouveau Parlement.
Un imbroglio, jugé par les médias grecs de mauvais augure, s'est noué dans la nuit, opposant les services de M. Papoulias à M. Kammenos.
Pour surmonter l'opposition de la gauche radicale du Syriza à un gouvernement de coalition, M. Papoulias l'avait appelé en renfort pour la réunion en début d'après-midi, et devait auparavant le rencontrer en tête à tête.
Mais ce premier rendez-vous a été annulé à la dernière minute mardi matin, après un démenti de M. Kammenos sur son intention de soutenir le plan de crise "pour quelques mois" si le sort du pays était en jeu, que lui avait attribué des documents rendus publics par la Présidence, qui a ensuite maintenu sa version.
Transfuge conservateur opposé à l'austérité, M. Kammenos avait déclaré avant les élections qu'il préférait "mourir" que coopérer avec son ancien parti (Nouvelle Démocratie) et les socialistes. Il dispose de 33 députés sur 300, un renfort qui pourrait être précieux pour les deux partenaires du gouvernement sortant, qui ne cumulent désormais plus que 149 députés.
Le président les a mis en garde les leaders politiques contre le "danger réel" que court le pays.
Il a invoqué des mises en garde du Premier ministre sortant, Lucas Papademos, du gouverneur de la Banque de Grèce et du ministre des Finances sur "l'état des réserves financières du pays et le danger d'écroulement du système bancaire si les retraits continuent du fait de l'insécurité que la situation politique créée chez les citoyens".
Après des déclarations menaçantes ces derniers jours de certains responsables européens sur le besoin pour le pays de continuer son programme de rigueur malgré la récession dans laquelle elle s'enfonce, la zone euro a fini par envoyer un message de soutien lundi soir, en réaffirmant son soutien "inébranlable" au maintien de la Grèce dans l'Union monétaire.
"La possibilité que la Grèce sorte de la zone euro n'a pas été l'objet de débat, personne n'a plaidé dans ce sens", a déclaré le président de l'Eurogroupe Jean-Claude Juncker, critiquant vertement la "propagande" de ceux qui évoquent la possibilité qu'Athènes en soit exclu.
Tout en assurant que sur le fond, le plan ne serait pas renégocié, M. Juncker a évoqué une possible prolongation des délais de mise en oeuvre, dans une première ouverture aux revendications désormais avancées par tous les responsables grecs d'un assouplissement de la cure de rigueur.
Charles Dallara, le patron de l'Institut de la finance internationale (IIF), organisation basée à Washington qui regroupe les principales banques du monde et a négocié récemment le plan d'effacement de dette souveraine avec la Grèce, a également apporté un soutien imprévu à Athènes, selon les médias grecs.
"Je fais partie de ceux qui pensent qu'une sortie de la Grèce de la zone euro n'est pas courue d'avance", a-t-il affirmé sur la chaîne britannique Channel 4, reprise par le quotidien Kathimerini.
Par ailleurs, mardi, la Grèce a confirmé la profondeur de la récession dans laquelle elle s'enfonce, en raison notamment des mesures d'austérité qui la frappent. Le PIB du pays a chuté de 6,2% au premier semestre 2012, après quatre année consécutive de PIB négatif ou récession.
Et le pays a dû payer plus cher mardi pour lever de l'argent à court terme, avec un taux de 4,34% pour lever 1,3 milliard d'euros en bons du Trésor à trois mois, au lieu de 4,20% le 17 avril.