Le président de la République Nicolas Sarkozy a implicitement acté mardi la suppression conjointe en 2011 du bouclier fiscal, mesure emblématique mais très contestée de son quinquennat, et de l'impôt sur la fortune (ISF), qui seront remplacés par un nouvel impôt sur le patrimoine.
Comme il s'y était déjà engagé, le chef de l'Etat a annoncé qu'il proposerait "avec le Premier ministre et le gouvernement une réforme fiscale dans un projet de loi de finances au printemps 2011".
Il semblait jusqu'ici pencher pour un aménagement du bouclier fiscal et de l'ISF, alors qu'une centaine de députés de la majorité ont réclamé par voie d'amendement -repoussé fin octobre lors de l'examen du Budget 2011- la suppression des deux dispositifs.
Mais mardi, lors d'une longue interview à la télévision, il leur a implicitement donné satisfaction.
Il a en effet évoqué la création d'un nouvel impôt sur le patrimoine. "L'erreur faite dans les années passées, c'était de taxer le patrimoine alors qu'il vaut mieux taxer les revenus du patrimoine et les plus-values du patrimoine", a-t-il dit.
"C'est l'axe de la réforme que nous allons engager", a-t-il affirmé.
"On va donc vers une suppression du bouclier fiscal, une suppression de l'ISF (impôt de solidarité sur la fortune)?", l'a interrogé l'un des journalistes... Sans démentir, Nicolas Sarkozy a enchaîné: "et une création d'un nouvel impôt sur le patrimoine".
"S'il n'y a plus d'ISF, il n'y a plus besoin de bouclier fiscal", a dit le chef de l'Etat.
Cette réforme se ferait officiellement au nom de la convergence fiscale avec l'Allemagne, afin d'amortir les distortions de compétitivité entre les économies des deux pays, l'Allemagne ne connaissant ni bouclier, ni ISF.
La Cour des comptes doit remettre un rapport sur le sujet début 2011.
"Je ne peux pas accepter les déficits de compétivité avec notre principal client et partenaire qui est l'Allemagne", a d'ores et déjà avancé Nicolas Sarkozy, évoquant au passage une nécessaire "harmonisation" des assiettes fiscales entre les deux pays.
La réforme permettrait d'"harmoniser la fiscalité française et la fiscalité allemande, parce que je ne veux plus de délocalisations, parce que je souhaite qu'on garde des industries en France", a-t-il encore souligné.
Le bouclier fiscal, qui plafonne aujourd'hui l'impôt (CSG et CRDS comprises) à 50% des revenus d'un contribuable, est une mesure phare du quinquennat mais est désormais contestée de toutes parts, jusque dans les rangs de la majorité, pourtant sommée de le défendre contre vents et marées pendant trois ans.
Pour ses détracteurs, il n'a pas rempli l'objectif affiché par le gouvernement, à savoir inciter les grandes fortunes qui avaient quitté la France à rapatrier leurs avoirs.
Le ministre du Budget François Baroin a même dû reconnaître qu'il était perçu comme un "symbole d'injustice".
En 2009, 18.764 contribuables en ont bénéficié, ce qui a coûté à l'Etat 679 millions d'euros. L'ISF rapporte de son côté à l'Etat environ 3,2 milliards d'euros.
Pour ne pas grever un peu plus les finances publiques, que le gouvernement veut redresser, le nouvel impôt sur les revenus du patrimoine et les plus-values devra au moins compenser la différence.
La loi de finances 2011 prévoit déjà un relèvement de la taxation sur les plus-values mobilières et immobilières, à 31% en intégrant les prélèvements sociaux.