Symbole de l'industrie dans l'est de la France, l'enseigne Vogica, spécialisée dans la vente de cuisines et salles de bain sur mesure, a été placée en liquidation judiciaire lundi faute de repreneur, une décision qui laisse sur le carreau un millier de salariés.
Le tribunal de commerce d'Evry (Essonne), où se trouve le siège social du cuisiniste, a désigné un mandataire judiciaire, Me Pascale Huille-Eraud, désormais chargée de procéder à la vente des actifs de l'entreprise.
"Le tribunal a annoncé aujourd'hui (lundi, ndlr) la liquidation judiciaire de Vogica", a déclaré un porte-parole de la PME à l'AFP.
Confronté à des difficultés d'approvisionnement et de livraison liées à une réorganisation de sa production, Vogica avait déposé le bilan fin septembre. Le cuisiniste avait notamment cessé de payer son nouveau fournisseur, l'industriel vosgien Nevelt, lequel avait riposté en arrêtant de le livrer.
L'entreprise s'était tournée vers la justice en demandant l'ouverture d'une procédure en redressement judiciaire dans l'espoir de trouver un repreneur.
Selon des sources proches du dossier, des candidats ont manifesté leur intérêt mais aucun n'a fait d'offre de reprise. Parmi eux, les groupes de distribution Castorama, Conforama, Brico Dépôt et But.
Trois fonds dits "vautour", spécialisés dans la reprise d'entreprises au bord du précipice, ont aussi examiné le dossier.
La marque, née en 1976 dans les Vosges, était organisée avant sa faillite autour de deux filiales: Vogica, qui commercialisait cuisines et salles de bain personnalisées, et l'usine Manuest.
Manuest, qui emploie 125 employés et dont les comptes ne seraient pas dans le rouge, pourrait trouver un acheteur, selon une autre source proche du dossier.
Pour le reste, c'est la fin d'une histoire semée de difficultés financières chroniques aggravées par la crise.
Dans l'immédiat, la plupart des 1.047 salariés du groupe devraient se retrouver au chômage. Quant aux clients, ils sont invités à déclarer leurs créances auprès du mandataire judiciaire. Ceux ayant passé commande pendant la période de redressement judiciaire se verront retourner leur acompte.
Les 45 magasins Vogica sur l'ensemble du territoire seront fermés à partir de mardi.
Depuis le début de l'année, l'annulation des commandes par les ménages et des problèmes industriels chez son fournisseur ont limité fortement l'activité du cuisiniste, entraînant la cessation des paiements.
Sur 58 millions d'euros de commandes depuis le début de l'année, 4 millions ont été annulées, dont la moitié déjà fabriquées.
Pourtant en 2007, Vogica avait procédé à un virage stratégique qui lui avait permis d'affronter la concurrence en se lançant dans du "prêt-à-poser".
Mais la direction avait décidé d'externaliser la production pour répondre aux difficultés de Manuest, contraint de procéder à un plan social touchant les deux tiers de ses emplois. Ce dernier s'était alors concentré sur la fabrication de cuisines en kit pour les enseignes Castorama et Brico Dépôt.
Mais cette réorganisation a sonné le glas de cette étoile de l'industrie vosgienne.
Les livraisons promises avec un délai de huit semaines par son nouveau fournisseur, Nevelt, se sont décalées sur des mois. Des pièces manquantes ont imposé des installations en deux, trois, voire quatre fois, faisant exploser les coûts de logistique de la société.
Des retards se sont accumulés avec des effets négatifs sur la qualité des produits.
En 2009, Vogica, dirigée par William Ego, avait vu son chiffre d'affaires chuter de 33% à 71 millions d'euros, accusant sur l'année une perte nette de 1,4 million.