PARIS (Reuters) - La CFE-CGC, FO et la CFDT d'Air France sont prêts à s'engager dans une grève "dure" en octobre si la direction annonce un plan de réduction d'effectifs et de fermetures massives de lignes, ont déclaré mercredi à Reuters des représentants de ces trois syndicats prédominants au sein de la compagnie aérienne.
Air France a annoncé le 4 septembre aux représentants du personnel qu'elle pourrait devoir réduire de 10% son réseau long-courrier d'ici 2017, entraînant des suppressions de postes, dont des licenciements secs, si elle ne parvient pas à un accord avec les navigants d'ici la fin du mois.
Pour éviter d'avoir à activer ce "plan B", la direction s'est fixé un calendrier soutenu de réunions de négociations avec les hôtesses, stewards et pilotes en prévision des conseils d'administration du groupe Air France-KLM le 1er octobre et d'Air France le 2 octobre.
Ronald Noirot, secrétaire général de la CFE-CGC d'Air France, premier syndicat de la compagnie, a dit avoir pour "feuille de route" de n'accepter ni licenciements, ni baisses de salaires et de s'assurer que toute mesure sera transparente et équitable.
"Si la direction devait annoncer une phase de licenciements lourde, comme on s'y attend, ce serait une véritable déclaration de guerre", a-t-il dit.
Il a ajouté anticiper dans ce cas un mouvement de grève après le comité central d'entreprise (CCE) du 5 octobre au cours duquel sont attendues les mesures de la direction. "Il faut s'attendre à quelque chose de très dur", a-t-il ajouté.
BLOCAGE
Les discussions sont pour l'instant bloquées par le conflit ouvert entre la direction et le Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL), qui a annoncé jeudi dernier accepter de négocier le nouveau plan de restructuration "Perform 2020" avant même d'avoir bouclé le plan précédent, "Transform 2015".
Mais le SNPL, à l'origine de la grève de 15 jours qui a coûté quelque 400 millions d'euros à Air France il y a un an, a dit ne vouloir reprendre les négociations que vendredi, au lendemain d'une audience du tribunal de grande instance (TGI) de Bobigny sur la plainte déposée par la compagnie contre le syndicat concernant les négociations de "Transform 2015".
"Personne ne croit vraiment à une volonté du SNPL de négocier sur 'Perform' sérieusement", a déclaré Béatrice Lestic, secrétaire générale de la CFDT chez Air France. "On est spectateur de la comédie entre la direction et le bureau du SNPL. Mais à partir du 5 octobre, on va changer de ton."
Interrogée sur la perspective d'un mouvement de grève en cas de mesures sévères, elle a répondu par l'affirmative. "Nous ne sommes pas conviés à discuter. Donc si on ne discute pas, on fait autre chose", a-t-elle dit.
Christophe Malloggi, secrétaire général chez FO, a aussi dit prévoir un mouvement de grève en cas de mise en oeuvre du "plan B", qu'il qualifie d"inimaginable".
Une porte-parole d'Air France n'a pas souhaité faire de commentaire.
Au SNPL, le porte-parole a déclaré que le syndicat, qui a proposé une nouvelle intersyndicale jeudi, sera bien à la table des négociations avec Air France le lendemain pour discuter de "Perform 2020", quelle que soit l'issue de l'audience au TGI.
Pour Gerald Khoo, analyste chez Liberum, la solution devra forcément être radicale si Air France veut améliorer sa productivité et baisser ses coûts salariaux, son premier poste de dépenses.
"En essayant de protéger un réseau plus large, tout ce que l'entreprise parvient à faire, c'est perdre de l'argent", résume-t-il.
Plusieurs syndicats d'Air France (mais pas la CFE-CGC ni la CFDT) ont par ailleurs demandé mardi à être reçus par le Premier ministre Manuel Valls, à qui ils réclament une révision de la politique gouvernementale en matière de transport aérien.
(Cyril Altmeyer, édité par Dominique Rodriguez)