par Amélie Baron
PORT-AU-PRINCE (Reuters) - L'ancien dictateur haïtien Jean-Claude Duvalier, dit "Bébé Doc", a succombé samedi à une crise cardiaque à l'âge de 63 ans, a annoncé son avocat Reynold Georges.
Après avoir succédé à son père à l'âge de 19 ans en 1971, il avait dirigé le pays pendant 15 ans, puis s'était exilé en 1986 en France où il a vécu 25 ans. Il était rentré en Haïti en janvier 2011 et avait été brièvement interpellé pour corruption et vol.
En février dernier, un tribunal haïtien avait estimé qu'il pourrait être poursuivi pour crimes contre l'humanité. La cour d'appel de Port-au-Prince avait jugé que Jean-Claude Duvalier pouvait être tenu responsable des abus commis par l'armée et par les "Tontons Macoutes", la milice paramilitaire créée par son père, François, accusée de plusieurs centaines de meurtres et disparitions jamais élucidées.
"Bébé Doc", qui s'était autoproclamé "président à vie" d'Haïti, niait toute responsabilité.
Devant la cour, il avait affirmé que les fonctionnaires de son gouvernement avaient "leur propre pouvoir".
A sa fuite en exil, en 1986, on estimait que Jean-Claude Duvalier avait détourné plus de 100 millions de dollars sur des comptes bancaires en Europe.
Reed Brody, de l'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch, a regretté qu'il soit mort avant de répondre de ses crimes devant un tribunal.
"La mort de Duvalier prive les Haïtiens de ce qui aurait pu être l'un des plus importants procès en matière de droits de l'homme de l'histoire de ce pays", a-t-il dit.
L'actuel président haïtien Michel Martelly, accusé de sympathies duvaliéristes par ses adversaires, a présenté pour sa part ses condoléances à la famille de l'ancien dictateur.
"En dépit de nos querelles et nos divergences, saluons le départ d'un authentique fils d'Haïti", écrit-il. "L'amour et la réconciliation doivent toujours vaincre nos querelles intestines. Que ton âme repose en paix, Jean-Claude Duvalier."
(Avec David Adams; Jean-Philippe Lefief et Henri-Pierre André pour le service français)