BEYROUTH (Reuters) - Le Liban s'est doté vendredi d'un nouveau gouvernement dirigé par Najib Mikati, au terme d'un an de querelles politiques qui ont exacerbé la profonde crise économique et financière que traverse le pays depuis deux ans.
Le nouveau Premier ministre et le président Michel Aoun ont signé le décret de formation d'un nouveau gouvernement, en présence du président du Parlement, Nabih Berri, a annoncé la présidence libanaise dans un communiqué.
Le Liban était dépourvu de gouvernement depuis plus d'un an, le Premier ministre Hassan Diab ayant démissionné en août 2020, une semaine après la double explosion meurtrière dans le port de Beyrouth.
Le président français Emmanuel Macron a salué "une étape indispensable pour prendre les mesures d’urgence que les Libanais attendent".
Il a en outre souligné dans un communiqué la nécessité pour l'ensemble des responsables politiques libanais de se conformer "aux engagements qu’ils ont pris de permettre la mise en oeuvre des réformes nécessaires pour préparer l’avenir du Liban".
La formation d'un nouveau gouvernement était un préalable à la reprise des discussions avec le Fonds monétaire international (FMI) et à un soutien accru de la communauté internationale à une économie au bord de l'effondrement.
Dans une interview à la chaîne Asharq News, basée à Dubaï, Najib Mikati a déclaré que la conduite des négociations avec le FMI était l'une des missions qui avaient été assignées à son gouvernement.
Intervenant précédemment à la télévision libanaise, Najib Mikati a évoqué les larmes aux yeux les souffrances endurées par les Libanais ces derniers mois en raison des pénuries de médicaments, de nourriture ou d'essence.
Il a assuré que les élections législatives prévues au printemps prochain se tiendraient comme prévu.
TRACTATIONS SOUS L'ÉGIDE DE LA FRANCE
L'accord conclu entre les trois grandes communautés qui se partagent le pouvoir au Liban - le sunnite Najib Mikati, le chrétien maronite Michel Aoun et le chiite Nabih Berri - a été rendu possible par d'intenses tractations menées jusqu'au coeur de la nuit dernière sous l'égide de la France, a-t-on appris de sources politiques.
Paris s'est fortement impliqué dans la recherche d'une solution politique au Liban et ne cachait pas ces derniers mois son impatience et sa frustration face à l'incapacité des dirigeants libanais à s'entendre. Le président Emmanuel Macron s'est rendu à deux reprises à Beyrouth à l'été 2020.
Ce gouvernement est composé, comme le précédent, de "techniciens" relativement peu connus sur la scène politique, mais nommés à leurs postes par les grands partis.
Le portefeuille des Finances a été proposé à Youssef Khalil, un responsable de la banque centrale et ancien conseiller de son gouverneur Riad Salamé.
"Je pense que (Mikati) a 50% de chances d'accomplir quoi que ce soit, que ce soit en termes de programme avec le FMI, ou de l'aide des pays arabes", a déclaré l'économiste Toufic Gaspard, qui a conseillé le FMI et le ministère libanais des Finances.
Obtenir l'aide de pays arabes comme l'Arabie saoudite dépendra de l'influence du Hezbollah pro-iranien sur l'action du gouvernement, obtenir l'aide du FMI dépendra des réformes exigées par l'institution internationale qu'aucun des gouvernements précédents n'a mises en oeuvre, "un jeu politique très délicat", a-t-il ajouté.
Le Hezbollah a obtenu deux ministères sur 24.
(Reportage Maha El Dahan et Laila Bassam, version française Myriam Rivet et Tangi Salaün, édité par Sophie Louet et Jean-Stéphane Brosse)