par Michel Rose et Elizabeth Piper
ROME (Reuters) - Le Royaume-Uni et la France ont de nouveau bataillé sur la question de la pêche dimanche, Londres niant tout changement de position alors que Paris estime que la "balle est dans le camp" du gouvernement britannique, s'il veut éviter des représailles.
Les deux parties n'ont pas retenu la même chose de la rencontre entre le Premier ministre Boris Johnson et le président Emmanuel Macron en marge d'un sommet du groupe des 20 (G20) à Rome.
Boris Johnson a déclaré que la position de la Grande-Bretagne restait inchangée, ajoutant avoir été "perplexe" en lisant une lettre du gouvernement français demandant selon lui "que la Grande-Bretagne soit punie pour avoir quitté l'UE".
"Je ne pense pas que cela soit compatible avec l'esprit ou la lettre de l'accord de retrait ou de l'accord de commerce et de coopération, et c'est probablement tout ce que je dirai à ce sujet", a-t-il déclaré, en référence aux accords liés au Brexit.
Emmanuel Macron, qui s'est également exprimé lors d'une conférence de presse à l'issue du sommet, a assuré souhaiter un accord.
"Mon souhait ce n'est pas qu'on aille vers des mesures de rétorsion (...) c'est plutôt qu'on trouve un accord pour que nos pêcheurs puissent vivre de leur travail", a-t-il souligné à Rome. "Je ne veux pas avoir à utiliser des mesures de rétorsion, car cela n'aiderait pas nos pêcheurs".
Le chef de l'Etat a indiqué que la France avait proposé aux équipes de Boris Johnson un projet de "méthode" pour résoudre le conflit.
"Maintenant la balle est dans leur camp', a ajouté Emmanuel Macron, réaffirmant toutefois que des sanctions pourraient être prises dès mardi si Londres ne donnait pas suite à cette proposition.
Boris Johnson avait estimé auparavant qu'il revenait à Paris de faire le premier pas.
Pour l'Elysée, il appartient au gouvernement britannique de respecter les règles qu'il a acceptées en signant l'accord de Brexit avec l'Union européenne, et donc de délivrer davantage de licences aux pêcheurs français qui souhaitent opérer dans les eaux territoriales britanniques.
Pour le 10, Downing Street, en revanche, Londres est dans son bon droit et c'est le gouvernement français qui s'est mis en porte-à-faux avec l'Accord de Commerce et de Coopération conclu entre Londres et Bruxelles en prévoyant d'imposer à la Grande-Bretagne ces mesures de représailles.
L'Elysée ne fait pas du tout la même lecture de la situation et considère que Londres, qui a rejeté selon Paris près de 50% des demandes de licences déposées par les pêcheurs français, doit s'en tenir aux "règles".
Un conseiller de l'Elysée avait déclaré un peu plus tôt dans la journée que l'entretien entre les deux dirigeants avait permis de "prendre des mesures opérationnelles pour faire baisser la tension".
Un porte-parole de Boris Johnson a indiqué ne pas partager cette vision de la rencontre.
La France reproche depuis de longs mois à la Grande-Bretagne d'avoir délivré à ses pêcheurs un nombre de licences insuffisant pour accéder aux eaux britanniques, au vu des engagements pris par Londres à l'égard de l'Union européenne dans les accords encadrant le Brexit.
Parmi les mesures de représailles annoncées cette semaine par Paris figurent l'interdiction de l'accès aux ports français pour les pêcheurs britanniques qui viennent d'ordinaire y débarquer leurs prises, et le durcissement des contrôles phytosanitaires de certaines cargaisons.
Outre la question épineuse de la pêche, Emmanuel Macron et Boris Johnson ont discuté également du "protocole nord-irlandais" qui empoisonne également les relations entre Londres et l'UE.
Lors de sa conférence de presse, Emmanuel Macron a déclaré avoir proposé à Boris Johnson de faire des propositions à la commission européenne afin d'avancer sur ce dossier.
(Reportage Michel Rose et Elizabeth Piper, rédigé par Tangi Salaün et Jean-Michel Bélot)