par Philip Pullella
MARSEILLE (Reuters) - Le pape François a condamné samedi les "nationalismes belliqueux" et appelé à une réponse pan-européenne sur les migrations pour éviter que la mer Méditerranée, où plusieurs milliers de migrants se sont noyés, devienne "le tombeau de la dignité".
Dans un long discours au palais du Pharo, à Marseille, en présence du président Emmanuel Macron, le souverain pontife de 86 ans a prononcé un vibrant plaidoyer en faveur de l'accueil des migrants.
"Il y a un cri de douleur qui résonne partout, qui transforme la Méditerranée, la 'mare nostrum', le berceau de la civilisation, en 'mare mortuum', le tombeau de la dignité", a-t-il déclaré, utilisant des mots latins signifiant "notre mer" et "mer morte". "C'est le cri étouffé des frères et soeurs migrants", a-t-il ajouté.
Selon le Haut commissariat aux Réfugiés des Nations unies, environ 178.500 migrants ont traversé cette année la Méditerranée pour se rendre en Europe. Quelque 2.500 personnes ont trouvé la mort ou sont portées disparues.
Le pape a également appelé à accepter "un grand nombre d'entrées légales et régulières" de migrants, surtout ceux qui fuient la guerre, la famine et la pauvreté, plutôt que de privilégier la "préservation de son propre bien-être".
Les gouvernements de plusieurs pays européens, comme l'Italie, la Hongrie et la Pologne, sont dirigés par de fervents opposants à l'immigration.
En France, le sujet est également sensible et le Rassemblement national a jugé par exemple vendredi que le pape sortait de son rôle en s'exprimant sur la crise migratoire car c'est, selon le parti d'extrême droite, un problème politique.
Le pape, en visite depuis vendredi à l'occasion des Rencontres méditerranéennes, a commencé la journée de samedi dans la cité phocéenne en se rendant dans le quartier Saint-Mauront, l'un des plus pauvres de France, objet d'une profonde rénovation immobilière.
Après un parcours en papamobile au Prado, François a célébré samedi après-midi une grande messe au stade vélodrome où 57.000 fidèles étaient attendus. Selon les autorités, quelque 100.000 personnes se sont rassemblées pour apercevoir le pape lors de sa déambulation.
Le président français, Emmanuel Macron, des responsables gouvernementaux et la présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde, ont notamment assisté à la messe.
Des voix se sont élevées dans les rangs de la gauche contre la décision d'Emmanuel Macron d'assister à la messe papale, estimant qu'elle représentait une atteinte à la laïcité. Le chef de l'Etat a assuré avoir décidé d'assister à la messe par respect pour le pape.
Le président français a également discuté samedi avec le pape de diverses questions, allant des crises internationales à l'environnement ou l'immigration, à l'occasion d'un entretien en tête à tête d'une trentaine de minutes, a-t-on appris de l'Elysée.
A la fin de la messe, le souverain pontife a remercié la France pour son accueil avant de rendre hommage aux victimes du terrorisme, notamment aux victimes de l'attentat de Nice du 14 juillet 2016, qui avait fait 86 morts et 450 blessés.
"Je voudrais saluer les frères et soeurs venus de Nice, accompagnés de l'évêque et du maire, qui ont survécu au terrible attentat du 14 juillet 2016. Souvenons-nous dans la prière de tous ceux qui ont perdu la vie dans cette tragédie et dans tous les actes terroristes perpétrés en France et dans toutes les parties du monde", a-t-il dit.
(Gilles Guillaume et Camille Raynaud pour la version française)