Le chef du gouvernement italien Mario Monti, fort de la confiance obtenue au Sénat et du vote attendu vendredi des députés, doit passer du rythme du sprinteur à celui du marathonien car le plus dur reste à faire: adopter des mesures anti-crise concrètes.
Conscient des enjeux, l'ex-commissaire européen a annoncé dans son discours programmatique jeudi un plan de relance en "deux parties avec des objectifs et des échéanciers différents".
Le plus urgent est de restaurer la crédibilité de Rome en garantissant la gestion rigoureuse des finances publiques. Mais la deuxième phase sera essentielle car M. Monti veut lancer une vaste "modernisation des structures économiques et sociales".
L'ex-commissaire européen a obtenu une majorité écrasante de 281 sénateurs sur les 307 présents lors du vote de confiance, une première dans l'Italie de l'après-guerre, illustrant la gravité de la situation. Le vote en milieu d'après-midi de la Chambre des députés s'annonce tout aussi facile puisque les principaux partis le soutiennent, au moins pour le moment.
Toutefois, Silvio Berlusconi et son parti, le Peuple de la liberté (PDL), pourraient être tentés de lui retirer leur appui, dans trois mois environ, quand il aura "tiré les marrons du feu" en réglant les problèmes les plus urgents, pensent les médias.
"Nous durerons peu, pas une minute de plus de la confiance que nous accordera le Parlement", a reconnu vendredi M. Monti en parlant devant les députés "mais l'horizon temporel de mon gouvernement est le scrutin" prévu en 2013.
L'Italie a devant elle "une tâche quasi-impossible, mais nous y réussirons", a-t-il ajouté.
"Cela se présente plutôt bien pour le moment. Il a démontré qu'il y avait une autre manière (par rapport à Silvio Berlusconi, ndlr) de s'occuper des problèmes. Il a dit explicitement qu'il y aura une nouvelle taxe immobilière et une réforme du marché du travail, mais son gros problème sera de négocier avec les partis politiques et les syndicats", a estimé pour l'AFP James Walston, professeur à l'université américaine de Rome.
"M. Monti va essayer d'être ferme sans se montrer pour autant conciliant. Il n'agit pas pour obtenir un pouvoir politique ou pour être au centre de l'attention, comme Berlusconi", a ajouté M. Walston.
Le nouveau Premier ministre tranche aussi avec son style emprunt de sobriété et d'un humour discret, aux antipodes des blagues salaces de son prédécesseur.
"La tâche qui nous attend est extrêmement difficile et je doute que je serais ici aujourd'hui si elle ne l'était pas", a-t-il dit aux sénateurs dans un large sourire.
Avant son arrivée, l'Italie avait perdu la confiance des marchés en raison d'une dette colossale de près de 1.900 milliards d'euros qui a contribué à la chute de Silvio Berlusconi.
La presse de vendredi n'a pas manqué de relever les changements en cours.
"En moins d'une heure (durée de son discours au Sénat, ndlr) Mario Monti a mis un terme à une saison qui a duré 17 ans" depuis l'entrée en politique de Silvio Berlusconi en 1994, écrit le quotidien de gauche La Repubblica.
"Il parle d'une manière complètement différente de celle d'un politicien. Il affronte les problèmes du pays d'une nouvelle manière, de façon novatrice", a déclaré à l'AFP Stefano Folli, éditorialiste du quotidien des affaires Il Sole-24 Ore.
Pour le leader de la gauche radicale, Nichi Vendola, l'Italie est en train de "fêter la fin d'un style, celui porno-commercial qui a marqué la période berlusconienne".
Cela n'empêche pas M. Monti d'être très ambitieux puisque le programme qu'il a présenté jeudi se donne pour objectif de contribuer à sauver l'euro et de redonner à l'Italie son rôle dans une Union européenne qui "traverse sa plus grave crise de l'après-guerre".
Il se rendra mardi à Bruxelles pour présenter ses projets de réformes au président de l'Union européenne Herman Van Rompuy. M. Monti a également annoncé une rencontre à trois la semaine prochaine avec le président français Nicolas Sarkozy et la chancelière allemande Angela Merkel pour affronter la crise de l'euro.