Le précurseur d'un drone européen de combat, le Neuron, a réussi samedi son premier vol depuis une base du sud de la France, a annoncé le maître d'oeuvre du programme, Dassault Aviation.
"Il inaugure la prochaine génération d'aéronefs de combat, qu'ils soient pilotés ou non, avec l'ambition de préserver l'autonomie européenne dans ce domaine. C'est un défi majeur tant sur le plan technologique qu'industriel", a affirmé le ministère français de la Défense dans un communiqué.
L'appareil, une aile volante sans empennage vertical pour la rendre la plus furtive possible, a volé pendant 25 minutes, sous la surveillance de deux pilotes d'essai, installés dans une station au sol.
Le Neuron est un démonstrateur, c'est-à-dire un modèle servant à tester et développer des technologies qui pourraient servir un jour à un avion de combat sans pilote qui équiperait les forces aériennes européennes à l'horizon 2030.
Les drones actuellement en service servent à la surveillance ou tirent parfois des missiles dans des missions ponctuelles, mais aucun ne rivalise avec les performances des avions de combat.
Dans l'état actuel des réflexions stratégiques, les drones de combat pourraient être engagés au premier jour d'un conflit, pour détruire les défenses anti-aériennes de l'adversaire, mais ne remplaceront pas les avions pilotés.
"Aujourd'hui personne n'imagine un avenir entièrement avec des avions sans pilote", a souligné le directeur général technique de Dassault, Didier Gondoin.
"Il faut tenir 20 ans"
Contrairement au Pentagone, qui devrait prochainement lancer un appel d'offre pour la production d'un premier drone de combat, les Européens n'auront pas avant longtemps de budgets à consacrer à ce type d'arme.
En attendant, Dassault appelle de ses voeux le financement par les gouvernements européens intéressés d'un nouveau programme de démonstrateur opérationnel, de façon à préserver le savoir faire des ingénieurs.
"Il faut tenir 20 ans", a expliqué Eric Trappier, directeur général international de l'avionneur. "La question stratégique qui se pose aux Etats est: gardons-nous les capacités technologiques pour répondre aux défis de l'avenir?", a-t-il déclaré lors d'une récente présentation du Neuron à la presse.
Paris et Londres ont confié cet été une première enveloppe de 5 millions d'euros à Dassault et au constructeur aéronautique britannique BAE Systems pour réfléchir ensemble au futur drone de combat européen. BAE a lui aussi fabriqué un démonstrateur, le Taranis, qui n'a pas encore volé.
Le programme Neuron a été lancé en 2003 par la France, avec le soutien de l'Italie, la Suède, l'Espagne, la Suisse et la Grèce. Il a coûté 406 millions d'euros, supportés pour moitié par la France.
Dassault a partagé la moitié de la charge de travail avec le constructeur suédois Saab, l'italien Alenia (groupe Finmeccanica), le grec Hellenic Aerospace Industry et le suisse RUAG et l'espagnol CASA (groupe européen EADS) qui a réalisé la station au sol. Au total 300 personnes ont travaillé sur ce programme, d'après M. Gondoin.
Le démonstrateur doit effectuer, de façon autonome, une mission de détection de localisation et de reconnaissance de cibles, en échappant aux radars et larguer une bombe depuis une soute intégrée au fuselage.
Après ce premier vol, la campagne d'une centaine d'essais au total doit se poursuivre jusqu'en 2014, en France, en Sardaigne et en Suède, a expliqué M. Gondoin. Il rejoindra ensuite le polygone de Perdadesfogu (Italie) pour d'autres essais, notamment de tirs et de mesure de furtivité", a indiqué Dassault Aviation dans un communiqué.
Selon le groupe, la "signature radar" du Neuron est "l'équivalent de celle d'un moineau", grâce notamment à la forme de l'appareil, son revêtement de surface et l'intégration des antennes dans le fuselage.