par Mumal Rathore et Shrutee Sarkar
BANGALORE (Reuters) - L'économie de la zone euro parviendra à dégager une croissance régulière mais modeste cette année et en 2019 bien qu'en ralentissement par rapport à 2017 et freinée par les tensions commerciales entre les Etats-Unis et leurs principaux partenaires, montre une enquête de Reuters auprès d'économistes.
La zone euro a enregistré l'année dernière sa plus forte croissance depuis la crise financière de 2007-2008 mais a perdu de son dynamisme en début d'année et les perspectives pour 2019 sont mitigées avec un ralentissement de l'inflation qui s'éloignera de l'objectif de la Banque centrale européenne (BCE).
Les 90 économistes interrogés par Reuters entre le 13 et le 21 août estiment toutefois que la BCE mettra fin en décembre à son programme de rachat d'actifs d'un montant total de 2.600 milliards d'euros destiné à soutenir la reprise et à relancer l'inflation.
Une éventuelle escalade des tensions commerciales entre les Etats-Unis et la Chine constitue le principal risque pesant sur les perspectives de croissance du bloc, estiment les économistes.
Le président américain Donald Trump et le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker ont conclu une fragile trêve sur le commerce le mois dernier et les négociations commerciales entre Washington et Pékin, interrompues depuis le mois de juin, reprennent cette semaine.
"Pour le moment, il semble que la rencontre Trump-Juncker a un peu dégagé l'horizon entre les Etats-Unis et l'Europe. Mais on ne peut pas exclure un retour de la guerre commerciale au second semestre (...) et il se pourrait que cela ait une incidence plus marquée", prévient Bert Colijn, économiste chez ING (AS:INGA).
"La question est de savoir quelle en sera l'ampleur et c'est très difficile à dire, mais nous avons déjà un peu revu en baisse nos prévisions au cours des derniers mois."
Sur les 53 économistes qui se sont prononcés sur le sujet, 33 ont dit que les tensions commerciales initiées par Donald Trump avaient affecté négativement leurs prévisions. Les 20 autres ont dit qu'elles n'avaient eu aucun impact et aucun d'entre eux n'en attend d'effets bénéfiques.
En dehors des tensions commerciales, l'éventualité d'une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne sans accord d'ici mars 2019 et d'autres tensions géopolitiques figurent parmi les risques pesant sur les prévisions.
La médiane des prévisions pour le début de l'année prochaine ressort en baisse par rapport à l'enquête du mois de juillet. La croissance d'un trimestre sur l'autre devrait être de 0,4% à 0,5% chaque trimestre cette année et l'année prochaine, les prévisions s'établissant entre 0,3% et 0,6%.
La croissance est attendue à 2,1% en moyenne pour l'année en cours contre 2,7% en 2017. Elle ralentirait encore à 1,8% en 2019.
"La grande question est de savoir si ce ralentissement peut être considéré comme 'normal' ou s'il s'agit d'un retournement prématuré au regard de la position de l'Europe dans le cycle économique", relèvent les économistes de BNP Paribas (PA:BNPP).
"Bien sûr, la réponse diffère selon les pays. Ceux qui ont été le plus affectés par la crise sont ceux qui ont la plus faible probabilité d'être confrontés à des contraintes en termes d'offre. A l'inverse, les économies qui sont déjà dans une phase avancée du cycle sont plus enclines à entrer dans une période de ralentissement."
Interrogés sur la probabilité d'une récession au sein de la zone euro au cours des 12 mois à venir, les économistes l'évaluent à 15%, contre 10% le mois dernier, selon la médiane de leurs prévisions.
Ils s'attendent toutefois à ce que la BCE relève ses taux directeurs l'année prochaine après les avoir maintenus à des niveaux ultra bas pendant une décennie alors que l'inflation restait très éloignée de son objectif d'un rythme proche mais inférieur à 2% l'an.
L'inflation au sein de la zone euro a atteint 2% en juin, à la faveur de la hausse des prix de l'énergie, mais la médiane des prévisions des économistes pour les deux prochaines années est de 1,7%, légèrement au-dessus toutefois de celle du mois dernier qui était de 1,6% pour cette année et l'année prochaine.
Les économistes interrogés s'attendent à ce que la BCE relève son taux de dépôt de 15 point de base à -0,25% au troisième trimestre de l'année prochaine et porte son taux de refinancement de 0% à 0,25% dans le courant du quatrième trimestre 2019.
(Marc Joanny pour le service français, édité par Juliette Rouillon)