Les syndicats du chantier naval STX de Saint-Nazaire, qui construit deux navires militaires Mistral pour la Russie, estiment que le chantier ira à son terme même si la pression monte sur la France pour renoncer à cette vente, sur fond de conflit ukrainien.
"On ne peut qu'espérer que la situation va s'apaiser en Ukraine et qu'on pourra sortir par le haut. Nous faisons le boulot normalement. Après, à qui on livrera, les mois à venir le diront", estime Christophe Morel, élu CFDT, deuxième syndicat du site, alors que les Européens débattent mardi d'un renforcement des sanctions contre Moscou.
"Nous ne sommes pas alarmistes sur la production proprement dite. Mais l’État devra prendre ses responsabilités", souligne pour sa part Joël Cadoret, secrétaire de la CGT, premier syndicat du site.
Lundi, le président français, François Hollande, a affirmé que la livraison du premier des deux bâtiments de projection et de commandement (BPC), le Vladivostok, aurait bien lieu, en soulignant que la Russie avait "payé". Mais il a affirmé que la livraison du second, le Sébastopol, "dépendra de l'attitude" de Moscou dans le conflit ukrainien.
Le Vladivostok est achevé et doit être livré en octobre. Quatre-cents marins russes sont arrivés le 30 juin à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) pour se former à son maniement jusqu'en octobre.
Le Sébastopol est réalisé à plus de 50% et doit être livré en octobre 2015. L'arrière du navire construite en Russie, arrivée le 15 juillet, a été assemblée la semaine dernière à l'avant construite à Saint-Nazaire.
Les clients potentiels pour ce second navire ne seraient cependant pas légion, reconnaissent les syndicats.
"L'Otan et l'Europe ont déjà clairement dit qu'ils ne paieraient pas, la Marine française est déjà pourvue et n'a pas les moyens. En outre, ces bateaux ont une technicité propre aux Russes, comme la fonction brise-glace", souligne Nathalie Durand (FO).
Or "il faut que ce deuxième BPC se fasse pour maintenir la charge de travail, sinon plus de 300 salariés risquent à nouveau le chômage partiel", estime la syndicaliste, rappelant que cette commande, conclue en 2011, avait alors représenté "une bouffée d'oxygène pour le chantier".
Joël Cadoret relativise toutefois l'importance de ce contrat pour le chantier, qui emploie au total quelque 2.000 salariés et 4.000 sous-traitants.
"La charge de travail pour un BPC n'est pas du tout comparable à celle que représente un paquebot. La priorité doit être donnée à la construction navale civile, qui répond aux besoins des peuples, par exemple pour la SNCM", estime l'élu CGT.
"Nous avons toujours été très réservés sur la construction de navires militaires, qui peuvent être employés contre les peuples et relèvent de la sphère politique. On voit aujourd'hui les conséquences que cela peut avoir", ajoute M. Cadoret.
Le contrat russe, d'un montant de 1,2 milliard d'euros, avait été conclu sous la présidence Sarkozy, via le groupe de défense français DNCS.