par Lucia Mutikani
WASHINGTON (Reuters) - Les créations d'emploi ont ralenti plus fortement que prévu en janvier aux Etats-Unis, mais la hausse des salaires et un taux de chômage au plus bas depuis huit ans semblent témoigner d'une vigueur persistante du marché du travail.
Les créations d'emploi non-agricoles ont reculé à 151.000 le mois dernier et le taux de chômage est descendu à 4,9%, un plus bas depuis février 2008, montrent les statistiques publiées vendredi par le département du Travail.
Les économistes interrogés par Reuters s'attendaient en moyenne à 190.000 créations d'emploi et à un taux de chômage stable à 5%.
Les données de novembre et décembre ont été révisées et montrent que l'économie américaine a créé sur ces deux mois 2.000 emplois de moins qu'estimé précédemment.
Parallèlement aux créations d'emploi inférieures aux attentes en janvier, les heures travaillées par les salariés ont augmenté et les salaires ont rebondi.
"Les marchés peuvent y voir un signe qu'il est trop tôt pour écarter définitivement une hausse de taux en mars de la part de la Réserve fédérale", a réagi Mohamed El-Erian, économiste chez Allianz (DE:ALVG).
Telle est bien l'interprétation que les intervenants de marché ont donnée à ces chiffres de l'emploi, puisque, après leur publication, le dollar s'est raffermi face à un panier de devises de référence, le prix des obligations d'Etat américaines a reculé et la Bourse de New York a ouvert en baisse.
LA PARTICIPATION AU MARCHÉ DU TRAVAIL RESTE FAIBLE
La Réserve fédérale américaine a relevé ses taux directeurs en décembre pour la première fois depuis près de 10 ans. Elle s'est alors engagée à poursuivre son resserrement monétaire de manière progressive.
Les turbulences sur les marchés financiers durant tout le mois de janvier avaient cependant conduit les investisseurs à ne plus croire à la moindre hausse des taux en 2016 aux Etats-Unis.
Le net ralentissement des créations d'emploi en janvier est le contrecoup de la vigueur des embauches au quatrième trimestre, au cours duquel la douceur inhabituelle des températures a favorisé l'emploi dans des secteurs sensibles aux aléas climatiques comme la construction.
De même, la période des fêtes en novembre et décembre a nourri les embauches saisonnières de livreurs avec le pic annuel d'activité du commerce en ligne.
La lecture détaillée du rapport du ministère du Travail pourrait aussi atténuer les inquiétudes quant à l'ampleur du ralentissement de l'économie américaine, qui n'a crû que de 0,7% en rythme annualisé au quatrième trimestre 2015.
Le salaire horaire moyen a progressé de 12 cents, soit 0,5%, le mois dernier, alors qu'il était resté stable en décembre. Sur un an, sa hausse est de 2,5%.
Le taux de chômage se situant à un niveau généralement associé au plein emploi, la croissance des salaires devrait en outre accélérer cette année. Cela pourrait favoriser les retours sur le marché du travail, sur lequel le taux de participation, soit la part des Américains en âge de travailler occupant ou recherchant effectivement un emploi, n'a jamais été aussi faible depuis près de 40 ans, à 62,7%.
En janvier, l'intégralité des créations d'emploi a été le fait du secteur privé, essentiellement dans les services qui en ont créé 118.000. Le secteur public a détruit 7.000 emplois.
Malgré la vigueur du dollar et la faiblesse de la demande mondiale, le secteur manufacturier a créé 29.000 postes le mois dernier, le chiffre le plus élevé enregistré depuis août 2013.
(Avec Jennifer Ablan à New York; Bertrand Boucey pour le service français, édité par Marc Angrand)