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Développement: accord à Addis Abeba pour trouver 2.500 milliards de dollars

Publié le 16/07/2015 19:17
Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon (à d.) et la président de l'Union africaine Nkosazana Dlamini Zuma tiennent une conférence de presse le 13 juillet 2015 à Addis Abeba, en Ethiopie (Photo TONY KARUMBA. AFP)

Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon (à d.) et la président de l'Union africaine Nkosazana Dlamini Zuma tiennent une conférence de presse le 13 juillet 2015 à Addis Abeba, en Ethiopie (Photo TONY KARUMBA. AFP)

Les pays riches et les Nations en développement se sont entendus jeudi sur les moyens de trouver les quelque 2.500 milliards de dollars nécessaires au financement du développement d'ici à 2030, à l'issue d'une conférence de quatre jours dans la capitale éthiopienne Addis Abeba.

Ces fonds sont nécessaires pour atteindre les 17 objectifs de développement durable (ODD) que l'ONU est en train de fixer pour 2015-2030, avec l'ambition d’éradiquer d'ici 2030 la pauvreté et la faim dans le monde, tout en maîtrisant le changement climatique.

Les pays donateurs ont réaffirmé leur objectif de consacrer 0,7% de leur revenu national brut (RNB) à l’aide au développement. Le document adopté à l'issue de cette conférence sous l'égide de l'ONU encourage également la coopération avec le secteur privé et propose des mesures de soutien aux pays en développement pour améliorer leurs politiques fiscales et générer davantage de revenus par la collecte d'impôts.

Pour le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, l'accord constitue "une importante avancée vers un monde de prospérité et de dignité pour tous".

Cet accord s'est néanmoins fait au prix d'un recul des pays pauvres sur la fiscalité: après d'âpres négociations, ils ont renoncé à la création d'un organisme, chapeauté par l'ONU, de lutte contre une évasion fiscale qui leur fait perdre tous les ans des dizaines de milliards de dollars.

La création de cette instance aurait eu pour mission d'établir de nouvelles normes fiscales internationales dans la lutte contre les flux illicites et l'évasion fiscale, en particulier des multinationales, qui font perdre des dizaines de milliards de dollars par an aux pays pauvres. Mais sa mise en place divisait pays du Nord et du Sud.

Les premiers estimaient que l'OCDE, qui regroupe les 34 pays les plus avancés, suffit pour débattre des questions de taxation internationale. Pour eux, un nouvel organisme chapeauté par l'ONU risquait surtout d'introduire des lourdeurs.

L'argument était contesté par les pays du G77, qui rassemble 134 pays en développement, emmenés par l'Inde et le Brésil, qui réclamaient, avec de nombreuses ONG, une instance intergouvernementale dans laquelle tous les pays pourraient faire entendre leur voix. L'idée était de mettre fin aux transferts de bénéfices permettant aux multinationales d'échapper à l'impôt dans les pays où elles opèrent, souvent en ayant recours aux paradis fiscaux.

- 'Enjeu très politique' -

Devant l'inflexibilité des pays du Nord, États-Unis et Royaume-Uni en tête, les pays en développement ont abandonné leur revendication, en raison notamment des appels pressants de l'Ethiopie, hôte de la conférence, qui craignait un échec de la conférence sur son sol.

Le texte final dit seulement que les experts du modeste Comité sur la coopération internationale en matière fiscale, qui existe déjà au sein de l'ONU avec un rôle purement consultatif, soient désormais nommés "par les gouvernements" et sélectionnés "selon une distribution géographique équitable".

"Les États-Unis et l'Europe ont réussi à garder la mainmise sur le système de gouvernance mondiale, dont fait partie la fiscalité. Il était important pour les pays en développement d'avoir une voix sur ces questions. Le monde de Bretton Woods (le système financier mondial établi en 1944) est préservé. Rien n'a changé", s'est agacé Lucie Watrinet, du CCFD-Terre Solidaire, coordinatrice de la Plateforme Paradis fiscaux et judiciaires.

Pour nombre de participants, la question de cet organisme fiscal dépassait la simple question des normes de taxation. Les pays du G77 y voyaient avant tout une façon de contester la domination des pays occidentaux sur l'établissement des règles internationales.

"Cette question est devenue un enjeu très politique. Il est facile de comprendre que les pays en développement ont besoin d'un organisme fiscal intergouvernemental plutôt que de s'entendre dire par l'OCDE ce qu'ils doivent faire. Mais il est plus difficile de dire si cette instance de l'ONU serait vraiment efficace pour générer davantage de recettes fiscales dans ces pays", juge Paddy Carter, chercheur à l'Overseas development institute (ODI), un groupe de réflexion britannique spécialisé dans le développement.

Les délégués insistaient cependant jeudi sur le "succès" de la conférence.

"C’est un compromis (...) C’est un processus et nous devons aller de l’avant", a confié Jayant Sinha, le ministre indien des Finances.

L’échec des pays du Sud sur la fiscalité ne doit pas cacher de réels progrès a estimé Eric LeCompte, directeur de Jubilee USA Network, organisation spécialisée sur la question de la dette des pays pauvres: "Il y a 3 ans, personne ne parlait de la questions des flux illicites et maintenant nous avons pour la première fois un accord global pour tenter de les éliminer d’ici 2030".

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