Le président chinois Xi Jinping a dévoilé lundi, lors d'une rare visite au Pakistan, des projets d'investissements de 46 milliards de dollars visant à "transformer" l'économie de son allié et créer un "corridor économique" reliant la Chine au Moyen-Orient via le territoire pakistanais.
Le président Xi a été accueilli en grande pompe lundi à Islamabad par le gotha politique pakistanais pour cette visite de deux jours sous haute surveillance, la première en neuf ans d'un chef d'Etat chinois au "pays des purs".
Le Pakistan et la Chine entretiennent des relations "amicales" depuis des décennies. Mais le commerce bi-latéral a véritablement commencé à décoller ces dernières années, dépassant les 12 milliards de dollars l'an dernier contre environ deux milliards une décennie plus tôt.
Pékin multiplie actuellement les investissements au Pakistan, géant musulman de près de 200 millions d'habitants miné par les attentats et une crise énergétique qui freine sa croissance économique, néanmoins prévue à 4,3% en 2015 par le Fonds monétaire international (FMI).
Lundi, des responsables chinois et pakistanais ont signé une cinquantaine d'accords de principe afin de mettre sur pied un "corridor économique sino-pakistanais" reliant l'ouest de la Chine au port pakistanais de Gwadar qui donne sur la mer d'Arabie, a déclaré le président Xi, affirmant soutenir "le développement économique et social" de son allié.
"L'amitié avec la Chine est la pierre angulaire de la politique étrangère du Pakistan", a renchéri le Premier ministre pakistanais Nawaz Sharif, affirmant que ce corridor économique allait bénéficier "à toutes les régions" du pays qui deviendra, selon lui, une "plaque tournante" de l'économie régionale.
Les autorités pakistanaises évoquent des accords bilatéraux chiffrés à 46 milliards de dollars, incluant plus de 33 milliards de dollars en projets énergétiques (solaire, charbon) visant à ajouter 16.400 Mégawatts au réseau pakistanais pour doubler sa capacité électrique, et plus de 11 milliards dans les infrastructures.
Ce corridor "change la magnitude de notre relation avec la Chine, du géopolitique au géo-économique", a déclaré à l'AFP Ahsan Iqbal, ministre pakistanais chargé de ces projets de développement.
Le Pakistan a transféré en 2013 le contrôle du port en eaux profondes de Gwadar, dans la province instable du Baloutchistan, à une société publique chinoise. Une fois la route et les infrastructures remises en état, ce port pourrait permettre de réduire de plusieurs milliers de kilomètres le trajet pour transporter le pétrole du Moyen-Orient vers l'ouest de la Chine tout en contournant l'Inde rivale.
Les deux pays misent aussi sur la construction d'un pipeline entre Gwadar et la ville pakistanaise de Nawabshah afin de distribuer du gaz naturel liquéfié (LNG) importé du Moyen-Orient dans le sud du Pakistan.
- Questions de sécurité -
Outre le commerce bilatéral, les questions de sécurité ont aussi été évoquées au cours de cette rare visite d'un chef d'Etat étranger au Pakistan.
Pékin craint l'infiltration d'islamistes armés du Pakistan voisin vers le Xinjiang, province musulmane frontalière, sporadiquement secouée par des violences. "La Chine veut sécuriser sa frontière et souhaite que le Pakistan s'assure qu'il n'y ait pas d'infiltration d'insurgés", estime l'ancien général pakistanais Talat Masood.
L'Afghanistan, pays à la fois frontalier de la Chine et du Pakistan, et plus précisément la réconciliation entre les talibans afghans et le pouvoir à Kaboul, et la "lutte contre le terrorisme" ont aussi été évoqués au premier jour de la visite de Xi Jinping à Islamabad.
Dans la foulée du raid taliban de Peshawar (nord-ouest), fatal à 154 personnes en décembre dernier, le Pakistan avait mis sur pied un "plan d'action national" contre le "terrorisme" et levé son moratoire sur la peine capitale, en vigueur depuis 2008.
"Nous soutenons le Pakistan pour qu'il puisse aller de l'avant dans sa stratégie de contre-terrorisme (...) et je suis prêt à contribuer pour améliorer les capacités contre-terroristes du Pakistan", a souligné le président Xi. "Le Pakistan considère que la sécurité de la Chine est aussi importante que la sienne", a quant à lui déclaré M. Sharif.