JERUSALEM (Reuters) - La municipalité de Jérusalem a suspendu mercredi l'octroi de nouveaux permis de construire pour près de 500 logements dans la partie orientale de la ville, occupée depuis 1967 et annexée par l'Etat hébreu.
La décision, a expliqué Hanan Rubin, membre du comité chargé de l'attribution des permis, a été prise à la demande du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, qui a souhaité ménager les Etats-Unis.
Elle est intervenue quelques heures avant un discours prononcé à Washington par le secrétaire d'Etat, John Kerry, et moins d'une semaine après l'adoption au Conseil de sécurité des Nations unies d'une résolution réclamant l'arrêt du développement des colonies de peuplement juives.
Quatorze des quinze pays membres se sont prononcés pour et les Etats-Unis, qui opposent d'ordinaire leur veto à ce genre de texte, se sont abstenus, ce que Benjamin Netanyahu a jugé "honteux".
Les relations entre Israël et Les Etats-Unis ont ces dernières années été parfois tendues, l'inimitié entre Barack Obama et Benjamin Netanyahu étant de notoriété publique.
Mais elles pourraient connaître une nette évolution avec l'entrée de Donald Trump à la Maison blanche le 20 janvier.
Illustrant ce possible changement, le futur président a critiqué mercredi l'attitude de l'administration Obama vis-à-vis d'Israêl.
"Nous ne pouvons pas continuer à laisser Israël subir un tel mépris et un tel manque de respect. Les Etats-Unis ont été leur grand ami mais..." a-t-il écrit sur Twitter.
"Ce n'est plus le cas. L'horrible accord avec l'Iran a été le début de la fin et maintenant il y a ça (la résolution de l'Onu)! Reste fort, Israël, le 20 janvier arrivera vite", a-t-il ajouté.
NÉGOCIATIONS GELÉES
Dans son discours en forme de bilan, John Kerry a admis qu'une solution du conflit israélo-palestinien impliquant la cohabitation de deux Etats semblait éloignée.
"En dépit de tous nos efforts ces dernières années, la perspective d'aboutir à une solution impliquant deux Etats est maintenant en grave danger", a-t-il déclaré.
"Les tendances observées sur le terrain - violence, terrorisme, expansion des colonies de peuplement et occupation d'une durée apparemment indéterminée - détruisent tout espoir de paix de part et d'autre et ne font que renforcer la réalité d'un seul Etat, dont la plupart des gens en fait ne veulent pas".
Mais, a-t-il souligné lors d'un discours prononcé au département d'Etat, les Etats-Unis "ne peuvent pas, en toute conscience, ne rien faire, ne rien dire, au moment où les chances d'aboutir à la paix s'amenuisent".
Son homologue français, Jean-Marc Ayrault, a salué le propos et a souligné que "la France partage la conviction (...) de la nécessité et de l'urgence de mettre en oeuvre cette solution des deux Etats".
Dans un communiqué, Benjamin Netanyahu a au contraire fustigé un discours "biaisé" à l'encontre d'Israël.
"Comme la résolution du Conseil de sécurité que le secrétaire Kerry a présenté aux Nations unies, le discours de ce soir était dirigé contre Israël", a dit le premier ministre israélien.
Pour ce dernier, John Kerry est "obsédé" par les colonies et il ignore tout des racines du conflit, de l'opposition des Palestiniens à l'existence d'un Etat juif quelles que soient ses frontières.
Selon Hanan Rubin, la municipalité de Jérusalem devait se prononcer mercredi sur la mise en chantier de 492 logements dans les implantations de Ramot et Ramat Shlomo. Le vote a été annulé "à cause du discours de Kerry. Bien qu'il soutienne la construction à Jérusalem, le Premier ministre a dit que nous ne devions pas attiser davantage les tensions", a-t-il expliqué.
Le comité se réunit régulièrement et les nouveaux projets pourraient être approuvés ultérieurement. Environ 570.000 Israéliens résident en Cisjordanie occupée et à Jérusalem-Est.
Le secrétaire général de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), Saeb Erekat, a réagi à cette nouvelle en invitant à nouveau Israël "à ordonner une cessation des implantations, y compris à Jérusalem-Est, afin de donner au processus de paix toutes les chances qu'il mérite avec la reprise de réelles négociations".
Ces négociations sont gelées depuis 2014.
(Jeffrey Heller, avec la rédaction de Washington, Jean-Philippe Lefief, Marc Angrand, Gilles Trequesser et Nicolas Delame pour le service français)