par Richard Balmforth et Thomas Grove
KIEV (Reuters) - Des véhicules blindés, des batteries lance-missiles et quelque 1.500 soldats, dont certains devaient partir ensuite pour le front de l'Est, ont défilé dimanche dans les rues de Kiev à l'occasion de la fête de l'indépendance ukrainienne, tandis que les séparatistes exhibaient leurs prisonniers à Donetsk.
Présentant le conflit contre les milices pro-russes du Donbass comme une "nouvelle guerre d'indépendance", le président Petro Porochenko, qui doit rencontrer son homologue russe mardi à Minsk, a annoncé le déblocage de 40 milliards de hryvnia (2,25 milliards d'euros) sur trois ans pour rééquiper l'armée ukrainienne.
Une colonne de soldats, suivis par des véhicules équipés de canons antichars et de lance-missiles, a défilé devant le chef de l'Etat sur la place de l'Indépendance, rebaptisée "Maïdan" (La Place), où se rassemblaient les manifestants pro-européens qui ont obtenu en février la destitution du président Viktor Ianoukovitch.
"Cette colonne qui passe devant vous part directement pour la zone de 'l'opération antiterroriste'", dans la région de Donetsk et Louhansk, a déclaré Petro Porochenko.
"Il est malheureusement clair que dans un avenir prévisible, l'Ukraine restera soumise à une menace militaire constante", a-t-il ajouté, évoquant la Russie, qui a annexé la Crimée en mars et que Kiev et les pays occidentaux accusent d'armer les rebelles séparatistes.
"Nous devons non seulement apprendre à vivre avec (cette menace) mais aussi nous tenir prêts en permanence à défendre l'indépendance de notre pays."
MERKEL SANS GRAND ESPOIR
A l'avant veille de la rencontre de Minsk entre Petro Porochenko et Vladimir Poutine, la chancelière allemande, qui s'est rendu samedi à Kiev, a estimé qu'il n'y avait rien de concret à en attendre.
"Ma visite à Kiev entrait dans le cadre des préparatifs de cette rencontre qui ne donnera probablement lieu à aucune avancée", dit Angela Merkel dans un entretien accordé à la chaîne ARD.
A Donetsk, les séparatistes pro-russes ont contraint plusieurs dizaines de soldats ukrainiens faits prisonniers à défiler.
Mal rasés, sales et vêtus aussi bien d'uniformes que de tenues civiles, ils ont marché tête baissée, encadrés de combattants munis de fusils à baïonnettes et suivis d'engins de nettoyage, comme si leur passage avait souillé la ville.
"Fascistes ! Tueurs !", leur ont crié les spectateurs, dont certains leur ont lancé des bouteilles, entre autres projectiles.
"Nous voyons maintenant passer les gens qui ont été envoyés pour nous tuer", avait auparavant annoncé un commentateur. "Nous sommes Russes !", a-t-il proclamé.
Un peu plus tôt, des tirs d'artillerie avaient touché le centre-ville. Des obus se sont notamment abattus dans l'enceinte du principal centre hospitalier de la ville. A Kiev, l'armée nie avoir ouvert le feu en direction de zones civiles.
Une fois le calme revenu, les habitants ont afflué sur la place Lénine pour voir le défilé des prisonniers et les carcasses de quatre véhicules blindés ukrainiens détruits par les séparatistes.
Alexandre Zakhartchenko, premier ministre de la République autoproclamée de Donetsk qui a pris la parole à l'occasion de ce rassemblement concurrent de celui de Kiev, a annoncé le lancement d'une contre-offensive. Olenivka, localité située à 20 km au sud de Donetsk pourrait selon lui tomber dans la journée.
L'armée dit quant à elle continuer à gagner du terrain, mais l'écrasement définitif des séparatistes que certains à Kiev annonçaient pour les commémorations de l'indépendance n'a pas eu lieu.
Le Conseil de défense national a fait état dimanche de 722 morts dans les rangs des forces gouvernementales. Le dernier bilan communiqué le 11 août était de 568 morts. Plus de 150 hommes ont donc été tués en deux semaines.
(Avec Natalia Zinets et Alessandra Prentice, Tangi Salaün et Jean-Philippe Lefief pour le service français)