par Arthur Connan
PARIS (Reuters) - Le dépassement annoncé du budget du Grand Paris Express, qui dépasserait 35 milliards d'euros, nourrit les inquiétudes sur ce gigantesque programme de travaux lancé pour désengorger le réseau actuel et relier les départements proches de la capitale.
Les maires d'Ile-de-France redoutent désormais que le gouvernement, engagé dans une chasse aux économies pour résorber le déficit public, ne revoie le projet à la baisse.
L'ouverture partielle de ce réseau de transport public, partie intégrante du Grand Paris, est envisagée pour l'accueil des Jeux olympiques en 2024.
Les travaux prévoient, entre autres, 68 nouvelles gares et l'extension de plus de 200 kilomètres de lignes de métro automatique qui doivent améliorer les déplacements dans toute l'Ile-de-France, comme la ligne Charles de Gaulle Express (CDG Express) ou de la ligne 15 Sud du Grand Paris.
Le montant total des lots de cette dernière, attribués à Vinci, Bouygues (PA:BOUY) et Eiffage (PA:FOUG), s'élève par exemple à 3,7 milliards d'euros.
Créée en 2010, la Société du Grand Paris (SGP) est chargée de réaliser, pour le compte de l'Etat, le nouveau métro. Initialement chiffré à 22 milliards d'euros, le budget du Grand Paris Express pourrait dépasser les 35 milliards d'euros.
"Après des études approfondies, la présentation des avant-projets, on a réajusté entre 28 et 35 milliards d’euros", a dit à Reuters Philippe Yvin, président du directoire de la SGP, précisant que les risques et les aléas expliquaient cette variation de 7 milliards.
"Début 2018, on va fixer un coût technique certain pour les derniers tronçons. A ce moment-là, nos instances se réuniront tous les trois mois, pour rendre des comptes aux ministères et au conseil de surveillance. On devra tout faire pour respecter ce budget définitif", assure-t-il.
NOUVELLE ORGANISATION EN 2018
Avant cela, Emmanuel Macron doit se prononcer sur la nouvelle organisation du Grand Paris. Attendues mi-octobre, ces annonces devraient être connues d'ici janvier 2018.
"Par le travail de concertation et de consultation mené par le préfet de région, nous devons arriver à un schéma plus simple, plus volontariste, plus efficace et là aussi il nous faudra peut-être l’accompagner d'une loi", a déclaré le président devant les maires de France le 23 novembre.
Le préfet d'Ile-de-France, Michel Cadot, qui assiste au conseil de surveillance de la SGP, a remis un rapport au gouvernement sur le programme de réalisation du Grand Paris.
Ce rapport doit intégrer la perspective des Jeux olympiques de 2024 et les surcoûts très importants qui sont apparus au cours des trois dernières années, a dit la secrétaire d'Etat auprès du ministère de la Transition écologique et solidaire, Brune Poirson.
Début 2017, les surcoûts du budget du Grand Paris Express étaient chiffrés entre 3 et 4 milliards d'euros, a dit à Reuters le président de la Métropole du Grand Paris.
"Dans le budget, il faut prendre en compte les coûts, le volume des emprunts et la durée des emprunts", explique Patrick Ollier, qui pense que les surcoûts seront absorbés par les emprunts.
"Je demande que tout soit mis en oeuvre pour terminer à temps ces travaux. Il peut y avoir des retards, mais cela ne doit pas empêcher la tenue des événements", ajoute-t-il.
REPORT DE TRAVAUX ?
Pour certains élus d'Ile-de-France, l'enveloppe de départ a été sous-évaluée.
"Le surcoût, qui est pour l'instant prévisionnel, est évalué entre 3 et 8 milliards d'euros. Si le budget est de 28 milliards, avec 8 milliards de surcoût, c'est embêtant", estime pour sa part le sénateur UDI Laurent Lafon.
D'autres craignent que le gouvernement revoie à la baisse le projet en décalant ou en supprimant certaines portions de lignes, qui seraient moins rentables ou trop chères.
"L'argument du financement invoqué par le gouvernement peut suffire quand on sait que le Grand Paris Express n'est pas indexé sur les crédits budgétaires de l'Etat", a dit un collectif de maires d'Ile-de-France, emmené par Anne Hidalgo, dans une tribune publiée dans Le Monde.
"Le Grand Paris Express ne produira ses effets bénéfiques que si 'la boucle est bouclée', que s'il est réalisé dans son entièreté et dans les délais fixés", ont-ils ajouté, rappelant que le projet répond à des enjeux "considérables de mobilité".
Du côté de la région Ile-de-France, on estime que c'est à l'Etat de maîtriser les coûts et que la priorité doit aller au réseau déjà existant.
"Il y a une dérive des surcoûts qui est inacceptable, qui met en péril les autres lignes du GPE", apprend-on dans l'entourage de la présidente Valérie Pécresse.
"La SGP doit revoir sa copie en maîtrisant les surcoûts, peut-être en revoyant la dimension de certaines gares, où un tiers du budget est parfois consacré rien qu'à la construction de la gare", ajoute cette source.
(Edité par Yves Clarisse)