par Marine Pennetier, Steve Holland et Michelle Nichols
PARIS/WASHINGTON/NATIONS UNIES (Reuters) - Emmanuel Macron a tenté jusqu'à la dernière minute la semaine dernière à New York de mettre sur pied un échange téléphonique entre les présidents américain Donald Trump et iranien Hassan Rohani afin d'amorcer un processus de désescalade entre les deux parties, ont rapporté mardi plusieurs sources.
Juste avant de regagner Paris mardi 24 septembre, le chef de l'Etat français s'est rendu un peu avant 21h00 dans le salon de réception du Millennium Hilton Hotel à New York, où logeait la délégation iranienne, dans l'espoir de pouvoir "déclencher" la négociation entre Washington et Téhéran sur l'épineuse question du nucléaire iranien.
"Nous avions une ligne sécurisée qui était installée à l'hôtel pour un contact téléphonique qui aurait pu avoir lieu", raconte une source diplomatique française, quelques heures après la publication par la presse américaine d'un récit de la soirée.
"Le président devait participer à cet entretien téléphonique pour faciliter le contact, l'appel était programmé à 21h00. On est arrivés juste avant 21h00 pour voir si le président Rohani sortait pour prendre l'appel", poursuit-elle. "Il n'est pas sorti pour l'appel, donc le président a pris sur cette ligne sécurisée le président Trump pour le remercier de sa disponibilité, il l'a en retour remercié de ses efforts."
Quelques heures plus tôt, le président français avait déjà tenté - en vain - de convaincre Hassan Rohani de rencontrer le président américain, toujours à l'hôtel Millennium et au côté du Premier ministre britannique Boris Johnson, en évoquant par le biais d'un interprète "une occasion perdue" en cas de refus.
Le président Rohani n'avait "pas les mains libres à New York", estime la source diplomatique française, sans mentionner le guide suprême de la révolution islamique, l’ayatollah Ali Khamenei, véritable détenteur du pouvoir en Iran. Il n'a pas pris l'appel "parce qu'il n'avait pas suffisamment d'assurance à Téhéran pour pouvoir le prendre".
"C'est dommage" mais "il fallait faire tout ce qui était possible pour déclencher la négociation", a-t-elle poursuivi, assurant que la France continuerait sa démarche visant à amorcer un dialogue entre les deux parties. "Ce qui est important est que les Iraniens n'ont pas dit non, ils ont dit qu'ils avaient besoin de temps."
SANCTIONS ECONOMIQUES
Par ailleurs, fait valoir cette source, il y a eu un "accord" à la fois américain et iranien sur quatre points : "l'Iran doit revenir en conformité avec ses engagements au titre du JCPOA (ndlr, l'accord de juillet 2015 sur le programme nucléaire iranien) et accepter des négociations sur un cadre de long terme à ses activités militaires", l'Iran "doit mettre un terme à sa politique agressive dans la région (...) et en contrepartie l'Iran obtiendrait la levée des sanctions américaines et pourrait disposer de ses revenus pétroliers".
"On est arrivé tout près à New York du moment où on pouvait déclencher la négociation qui en tout état de cause devra avoir lieu, on était tout près. Sur les quatre points, nous avions une convergence irano-américaine sur le fond."
Selon deux sources au fait du dossier, le président Trump aurait effectivement bien accepté de parler au téléphone avec Hassan Rohani le soir du 24 septembre mais il comptait à cette occasion, a précisé l'une de ces sources, réaffirmer son opposition à toute levée des sanctions.
Un message a été envoyé à Hassan Rohani pour lui indiquer qu'Emmanuel Macron souhaitait le voir, ont ajouté ces deux sources qui s'exprimaient sous le sceau de l'anonymat, mais le président iranien, informé de l'intention de Washington de réaffirmer sa ligne dure sur les sanctions, aurait alors décliné.
Les relations entre Washington et Téhéran se sont considérablement dégradées depuis la décision unilatérale prise en 2018 par Donald Trump de se retirer de l'accord sur le programme nucléaire iranien conclu en 2015 et de rétablir des sanctions économiques contre l'Iran.
En dépit de la pression de la communauté internationale, les deux parties campent sur leurs positions : la République islamique fait de la levée des sanctions un préalable à toute reprise de dialogue et Donald Trump poursuit sa stratégie "de pression maximale" sur Téhéran afin de pousser l'Iran à négocier un nouvel accord plus contraignant.
(Edité par Sophie Louet et Henri-Pierre André)