PARIS (Reuters) - Ziad Takieddine a annoncé mercredi sa mise en examen pour complicité de corruption d'agents public étrangers et de détournement de fonds publics en Libye après ses accusations sur la remise d'argent libyen à Nicolas Sarkozy avant la présidentielle de 2007.
L'homme d'affaires franco-libanais, qui conteste les chefs de mise en examen le visant, s'est néanmoins félicité de voir le dossier instruit par le juge Serge Tournaire avancer rapidement.
"Nicolas Sarkozy doit être éradiqué de la scène publique française car il peut revenir" en dépit de son élimination à la primaire de la droite et du centre, a-t-il dit à Reuters.
Pour le juge, "il y a le corrupteur désigné qui s'appelle Mouammar Kadhafi, et il y a un corrompu qui a été désigné, c'est M. Sarkozy à travers Claude Guéant ou autres", a ajouté Ziad Takieddine à l'issue de son audition.
"C'est une histoire de corruption, c'est une histoire de financement de campagne politique".
A la mi-novembre, Ziad Takieddine avait affirmé au site d'informations Mediapart avoir remis entre 2006 et janvier 2007 trois mallettes d'argent libyen pour un total de 5 millions d'euros à Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, et à Claude Guéant, qui était son directeur de cabinet.
Il avait confirmé ses dires devant les enquêteurs le 17 novembre, tout en assurant qu'il n'était pas question à l'époque de financer la campagne électorale du futur chef de l'Etat.
Son avocate, Elise Arfi, avait en effet expliqué à Reuters qu'il pensait remettre les fonds en vertu d'accords prévoyant la formation d'agents du renseignement libyen par la France.
DES BILLETS D'AVION DANS LE DOSSIER
"C'est le mobile qu'on lui donne au moment où il sert d'intermédiaire", avait-elle dit. "A l'époque, il n'a jamais été question de financer une quelconque campagne électorale, il n'a pas d'éléments pour l'affirmer."
Nicolas Sarkozy et Claude Guéant ont démenti formellement les faits allégués par Ziad Takieddine, mis en examen dans le volet financier de l'affaire Karachi, et leurs avocats ont annoncé des poursuites en diffamation à son encontre.
Dans Le Figaro, Nicolas Sarkozy avait dénoncé une "manœuvre nauséabonde pour interférer dans la primaire de la droite et du centre", finalement remportée par son ancien Premier ministre François Fillon.
Ziad Takieddine a affirmé mercredi que ses déclarations étaient corroborées par les déclarations ou écrits d'anciens dignitaires libyens vivants ou morts, dont l'ancien Premier ministre, et qui figurent au dossier.
Il a ajouté que les billets d'avion de ses propres voyages en Libye étaient "totalement répertoriés" et qu'ils confirmaient les dates qu'il avait indiquées pour les remises d'argent. "Ils sont dans le dossier judiciaire, il y a dix pages de voyages".
Le parquet de Paris a ouvert en avril 2013 une information judiciaire sur un possible financement libyen de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007. L'enquête porte sur des chefs de corruption active et passive, trafic d'influence, faux et usage de faux, abus de biens sociaux et blanchiment, complicité et recel de ces infractions.
Ziad Takieddine avait déjà accusé Nicolas Sarkozy devant la justice ou la presse d'avoir bénéficié de largesses de Tripoli mais il n'avait jamais indiqué avoir lui-même livré de l'argent.
(Gérard Bon, édité par Yves Clarisse et Chine Labbé)