STRASBOURG/PARIS (Reuters) - Vincent Lambert, dont le cas est devenu un symbole en France des débats sur la fin de vie, est mort jeudi matin à l'âge de 42 ans après des années de batailles judiciaires entre les membres de sa famille, qui se déchiraient sur son sort.
Les médecins du CHU de Reims (Marne) avaient arrêté le 2 juillet les traitements prodigués jusque-là à ce tétraplégique, en état végétatif depuis plus de dix ans.
Faute d'alimentation et d'hydratation artificielle, sa mort n'était depuis lors qu'une question de jours.
"C'est un soulagement qu'il soit parti parce que, concrètement, il aura souffert jusqu'au bout", a déclaré à des journalistes François Lambert, neveu de Vincent Lambert, qui était favorable de longue date à cette issue. "C'est un peu le rationnel qui prend le dessus."
A l'inverse, les avocats des parents ont une nouvelle fois dénoncé, dans un communiqué commun, les décisions judiciaires et médicales qui ont abouti à la mort de Vincent Lambert, véritable "crime d'Etat" selon eux.
Les traitements avaient déjà été suspendus le 20 mai, conformément aux souhaits de plusieurs membres de la famille, mais le corps médical avait dû annuler la procédure à la suite d'une décision rendue le soir même par la Cour d'appel de Paris, saisie en urgence par les parents de Vincent Lambert.
La querelle est allée jusqu'à la Cour de cassation, qui a annulé fin juin l'arrêt de la Cour d'appel.
UNE AUTOPSIE PRATIQUÉE VENDREDI
Le sort de l'ancien infirmier psychiatrique, qui souffrait de lésions cérébrales irréversibles depuis un accident de la route en 2008, avait fait exploser la famille.
D'un côté, ses parents, proches des milieux catholiques traditionalistes, un demi-frère et une de ses soeurs, tentaient d'obtenir son maintien en vie. De l'autre, son épouse et tutrice légale, cinq de ses frères et soeurs, ainsi que François Lambert, demandaient qu'on le laisse mourir, comme il l'aurait voulu selon eux.
La mort de Vincent Lambert n'éteint pas toutes les actions en justice puisque le procureur de Reims, Matthieu Bourrette, a ouvert aussitôt une enquête "en recherche des causes de la mort", comme il l'a annoncé lors d'une conférence de presse.
Cette procédure, "la plus neutre qui existe", permettra de savoir dans quelles circonstances exactes Vincent Lambert est décédé, "sans aucun parti pris", en faveur ni des parents, ni du reste de la famille, a justifié le magistrat.
A cette fin, il a demandé une autopsie du corps, qui sera pratiquée vendredi à l'institut médico-légal de Paris, et les enquêteurs procéderont bientôt à des auditions de toutes les parties prenantes, à la fois à l'hôpital et dans la famille.
Les parents ont par ailleurs déposé le 4 juillet une plainte pour "meurtre avec préméditation sur personne vulnérable" contre le médecin responsable de l'arrêt des traitements.
(Gilbert Reilhac à Strasbourg et Simon Carraud à Paris, édité par Yves Clarisse et Marine Pennetier)