Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
La réforme fiscale la plus importante depuis 31 ans (selon Donald Trump) a donc été adoptée par 224 voies contre 201. Elle va alléger la facture des plus gros contribuables (1 000Mds$ sur 10 ans) et celle des entreprises (-600 Mds$) qui ne pratiquaient pas l’optimisation fiscale.
Les classes moyennes n’en verront pas la couleur – ou alors les 25% des plus riches gagneront 900 $ par ménage. C’est l’une des réformes les plus anti-sociales et les plus déséquilibrées (immorales avec l’amnistie de la fraude fiscale) qui entérine une taxation ultra-light de 15% sur le cash, de 8% sur les instruments financiers.
▶ Réforme fiscale : un si beau cadeau que ça ?
Trump exulte, il parle d’un « bon gros cadeau de Noël » pour les Américains. Il se félicite du soi-disant plébiscite de Wall Street (qui lui devrait sa meilleure année post-électorale). Le président américain y voit le moteur de la poursuite du cycle de croissance, peut-être pour 4 ou 5 ans (jusqu’à sa prochaine candidature à sa succession). Il pense que les entreprises vont être incitées à embaucher et augmenter les salaires.
Wall Street a déjà fait ses calculs et ils reflètent une interprétation assez différente. La Tax Reform représente un petit coup de pouce de 0,3% à la croissance (grâce à quelques investissements supplémentaires). Mais c’est surtout un gros coup de pouce aux rachats d’actions et au versement des dividendes. Les hausses de salaires ? Wall Street ne prend même pas en compte un tel scénario parce que cela n’arrive et n’arrivera jamais ! En revanche, les revenus des dirigeants d’entreprise, payés en partie en stock-options devraient poursuivre leur envolée.
La contrepartie (et Wall Street semble s’en faire l’écho) ce sera un creusement des déficits mécanique de 200 Mds$ par an. Et cela même en tenant compte des dividendes de la croissance dont Donald Trump se félicite par avance. Cela s’ajoute à la dérive naturelle et inexorable des déficits budgétaires qui s’accroissent de 3 à 5% par an (soit potentiellement +1 000 Mds$ en 2018). Et comme la Fed semble déterminée à renchérir le loyer de l’argent jusqu’à 2,25% d’ici 12 mois, ce sont donc 21 000 Mds$ de dette officielle (la partie émergée de l’iceberg) que vont coûter ces 75 points de plus à refinancer.
▶ Réforme fiscale = tension des taux
Le rendement des T-Bonds US flirte avec les 2,49%. Ils se retendent de +13 points cette semaine. Le 30 ans quant à lui s’attaque aux 2,9%.
Cette tension contamine les Bunds qui affichent +2,5 points vers 0,415%. Cela représente plus de 10 points depuis le début de la semaine ! Nos OAT se tendent de 3 points à 0,745%. Et il ne serait pas surprenant de les voir tester la résistance des 0,80%. En effet, l’INSEE a rehaussé ses prévisions avec une croissance à +1,9% en France en 2017, une hausse du pouvoir d’achat de +1,6% et une hausse de +3,7% des investissements sur l’année écoulée.
Mais rassurez-vous, tout va bien du côté de l’inflation ! Cette dernière reste cantonnée autour de +1,2% en France, +1,5% en Europe, +1,7% aux Etats-Unis. Sauf que ces chiffres (vous le savez à force de nous lire) sont complètement faux et falsifiés. Alors à combien se situerait l’inflation si l’on devait y ajouter le coût de constitution d’une épargne retraite quand la même quantité d’argent ne permet désormais d’acheter que le quart des titres qu’on pouvait se payer il y a 8 ans ?
Il faut en réalité tripler son épargne pour obtenir le même revenu à la sortie ! Et ils ont dit « pas d’inflation » ?