Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
L’année 2017 s’achève sur une pluie de records sur les marchés américains. Le score (arrondi) s’affiche à +25% pour le Dow Jones, +19% pour le S&P500, et +28% pour le Nasdaq. Avec ses + 9,26%, le CAC fait bien pâle figure. Sans parler de l’indice phare européen, l’Euro Stoxx 50, qui est à la peine avec ses maigres 6% de progression.
Pour 2017, s’il y a bien un fait majeur qui est à en retenir en ce qui concerne les indices américains, il est à rechercher dans leur comportement à la fois inédit et anormal. Anormal au sens statistique du terme, j’entends. C’est-à-dire « hors norme ». Progression en mode volatilité minimale, tendance en ligne et absence de consolidation intermédiaire ont été au menu. Bref, du jamais vu dans l’histoire de Wall Street. Les quelques graphiques qui vont suivre vont vous permettre d’en juger par vous-même. En attendant, comportement hors norme ou pas, la préoccupation de l’investisseur est toujours la même : gérer ses positions. A savoir acheter, conserver, renforcer, alléger… ou vendre. Et surtout OU et QUAND.
C’est ce à quoi les analyses techniques qui vont suivre vont tenter de donner une réponse. Une réponse la plus claire et la plus simple possible. Pour prendre des décisions, nous avons besoin de repères concrets, tangibles et qui ont un sens, ou tout au moins une logique. Pour citer Thomas Watson, le fondateur d’IBM (NYSE:IBM), « faire simple, c’est éviter qu’un univers complexe ne devienne compliqué ». C’est en ce sens que l’analyse long terme des indices américains (Dow Jones, S&P 500 et Nasdaq) a été rédigée.
▶ Un Dow Jones hors norme
Commençons par le Dow Jones. Et vous allez voir qu’ensuite les mêmes observations et conclusions seront applicables au S&P 500 et au Nasdaq. En ce qui concerne le Dow Jones, voilà le tableau. Ou plutôt le graphe qui permet de planter le décor. Ce qui permettra d’en tirer ensuite les conclusions qui s’imposent.
Depuis 2009, le Dow progressait à l’intérieur d’une très forte dynamique haussière (cf. le grand canal gris). Fin 2016 et suite à l’élection de Donald Trump, ce canal a été cassé. Fait exceptionnel, il l’a été à la hausse et le Dow a fusé à l’intérieur d’un nouveau canal de progression extrêmement pentu (le vert). C’est ce qui a permis une sortie en extension (techniquement, c’est en excès – « S-E » sur le graphe).
Au premier coup d’oeil, on peut constater le comportement inédit et « anormal » dont il était fait mention en introduction. Les médias ont déjà largement commenté le fait que la volatilité n’a jamais été aussi faible sur un an. Concrètement, un simple coup d’oeil au graphe permet de s’en rendre compte à l’aide de l’extrême l’étroitesse du canal de progression actuel. Vous pouvez reprendre un graphe du Dow Jones depuis sa création, vous n’en trouverez pas montrant une volatilité aussi basse pendant aussi longtemps.
C’est du jamais vu. Du « hors norme ».
▶ Krach à la hausse
La hausse dans le canal post élection Trump s’est faite dans une tendance appelée tendance en ligne. C’est-à-dire une tendance ayant pour caractéristique d’avancer à marche forcée, sans laisser de place à une quelconque consolidation. Une autre caractéristique des tendances en ligne est qu’elles passent les résistances sans marquer le moindre arrêt ni pull-back.
Pour résumer, nous assistons actuellement à un « krach à la hausse ».
D’ailleurs, à titre de comparaison et pour bien mettre les choses en perspective, regardez la bulle techno des années 2000 et celle des subprime ayant éclaté en 2008. Elles n’ont l’air que de petits dos d’âne sans importance en comparaison de ce qui est en train de se passer. Sur les niveaux actuellement atteints, on peut se poser la question de savoir quel nouveau relais, quelles « nouvelles » fondamentales économiques ou géopolitiques pourraient permettre aux indices américains de tenir une telle cadence à la hausse.
A partir de ces simples constats, quoi faire, quelle attitude adopter sur les marchés ?
▶ Que faire ? Écoutez les marchés
Eh bien, si l’on se situe dans une perspective d’investisseur (ce qui est le but de ces analyses de long terme que je vous propose à chaque début de trimestre), la conclusion est simple : écoutez ce que dit le marché. En d’autres termes, cela revient à dire que tant que le Dow Jones poursuit sa progression dans la tendance en ligne (le petit canal très étroit en vue mensuelle), on ne peut que rester haussier.
Et quand une tendance en ligne s’arrête-t-elle ? Eh bien… quand elle s’arrête. A un moment donné, les niveaux de supports graphiques vont être cassés et c’est là – mais surtout pas avant – que l’on pourra se poser la question du risque de correction. Pour le moment, mon point de repère sera un support intermédiaire, soit le rectangle horizontal vert « S » qui se situe dans la zone des 24 000 points, soit à 3% des niveaux actuels. S’il est cassé, alors prudence, ce sera un premier signe de faiblesse auquel porter attention et qui à mon avis sera prémonitoire de la sortie du canal haussier de tendance en ligne. Sans doute une opportunité pour commencer à couvrir les portefeuilles.
Donc vous voyez, c’est un peu l’attitude d’un marcheur qui progresse dans un champ de mines. Il continue d’avancer. S’étonne qu’à chaque nouveau pas il soit encore en vie. Mais comme il doit suivre (la tendance), il décide de continuer… Cette méfiance relative à la progression du Dow Jones est renforcée par l’analyse du S&P 500 et du Nasdaq qui vont suivre. Je vais être bref car les configurations graphiques sont du même acabit que pour le Dow Jones.
▶ S&P500, attention aux 2 650 points
Sur le S&P500, nous voyons un canal haussier de très long terme (le gris) et une tendance en ligne active (petit canal violet).
Par contre, une résistance correspondant à la zone des 2 700 points vient d’être touchée (segment rouge « R » qui correspond aux reports d’amplitudes, les flèches verticales vertes et bleues). L’encadré en haut à droite montre une progression algorithmique dans un tout petit canal de tendance en ligne (orange).
Tout comme pour le Dow Jones, tant que le canal haussier tient bon, on ne peut que suivre la tendance. Mais disons qu’en cas de passage sous 2 650 points (segment vert dans l’encart), alors nous aurons eu la confirmation de l’existence d’une résistance actée vers les 2 700 points. Vu comme ça, cela peut prêter à sourire. Mais cela fait des mois maintenant que tout évolue dans des canaux de tendance en ligne et qu’aucune résistance décente ne s’est manifestée. Alors si la résistance des 2 700 points se confirme, attention, cela devrait être le signe avant-coureur d’un changement plus profond. Pas forcément d’un retournement mais du passage d’une dynamique (ultra) haussière à une dynamique de type range qui sera précédée d’une correction – dont nous ne pourrons évaluerons la magnitude que quand elle démarrera (volumes, accélération, etc.).
Pour le moment, notre démineur fait un pas de plus en territoire inconnu. Les positions haussières sont donc tenues. Mais on attend (sans anticiper) le premier petit « click » qui indiquera qu’il vient de marcher sur quelque chose de nouveau (rupture des 2 700 points).
▶ Nasdaq, attention aux 6 850 points
Même chose pour le Nasdaq Composite.
Après une sortie en excès (« S-E » sur le graphe), les prix continuent leur progression dans leur canal de tendance en ligne (vert) ont rejoint une résistance intermédiaire potentielle (« R-I »). C’est une projection due aux reports d’amplitudes intermédiaires (petites flèches verticales bleues) qui se situe vers 6 900 points. La conclusion sera donc ici de même nature que pour les deux précédentes : si l’on est positionné sur l’indice, on ne peut que suivre le mouvement de hausse, en attendant que les premiers craquements se fassent entendre. C’est-à-dire un passage sous le support de ce canal de tendance en ligne dont la création remonte maintenant à plus d’un an. Autrement dit, le signal sera pour le moment une rupture des 6 850 points.
Évidemment comme ces canaux sont haussiers, le niveau de leurs supports progresse à chaque bougie. Mais soyez-en certain, même si vous n’avez pas le temps ni les moyens de suivre tout cela de près, nous serons là pour vous prévenir dès que les premières alarmes se mettront à sonner.
Gilles