Publié à l'origine sur la Bourse au quotidien.fr
Le Pen et Macron sont au second tour et les marchés saluent ce résultat avec euphorie. L’indice parisien a gagné de plus de 4% lundi, les Bourses se sont envolées… et l’euro a retrouvé son plus-haut de l’année. Mais un truc me chiffonne quand même, là.
De quoi avaient peur les marchés en fait ?
Quelle était la véritable menace qui pesait sur les indices européens, incapables de rebondir depuis des semaines et avançant dans une lente consolidation sans aucune volatilité ? Avaient-ils peur qu’un Lassalle ou qu’un Cheminade renverse l’échiquier politique ? Craignaient-ils qu’un Poutou ou qu’Arthaud ensorcellent le corps électoral pour brûler vif les banquiers et autres investisseurs mangeurs d’ouvriers ? Plus réaliste, mais tout aussi peu probable : les « insoumis » de Jean-Luc Mélenchon étaient-ils vraiment une menace ? Ce qui effrayait les marchés, c’est une sortie de l’euro et un protectionnisme mené par le Front National. Ca tombe bien ils sont au second tour et les marchés montent ! Cherchez l’erreur. Alors que plus que jamais, Le Pen n’a été aussi près de prendre le pouvoir, les places boursières sabrent déjà le champagne à la victoire d’Emmanuel Macron. Le marché n’apprend rien, jamais.
A la recherche du sauveur
Le point commun à Mélenchon, Le Pen et Macron est qu’ils incarnent personnellement leur idéologie. Le Pen est issue d’une dynastie, Mélenchon a longuement travaillé son personnage et pour Macron, le nom même de son courant En Marche est composée par ses initiales. La personnification d’une solution est la voie ultime recherchée par une majorité de Français.
Le sauveur et sa révolution… Ce qui est sûr c’est que le visage politique de la France est déformé, tiraillé comme un lendemain de gueule de bois. Abstentionnisme, « extrême » droite et « extrême » gauche cumulent presque les deux tiers de la population française. La bipolarisation extrême que subit le pays ne peut pas être indolore. Et le sauveur tant attendu pourrait lui aussi avoir une sacrée gueule de bois au lendemain du scrutin des législatives. Gouverner un paquebot avec une boussole cassée et un équipage de frondeurs pourrait conduire à un destin de Titanic !
La Bourse ou l’orchestre du Titanic
A l’instar des musiciens du paquebot disparus dans les eaux de l’Atlantique Nord, les investisseurs semblent tout de même vouloir jouer la musique jusqu’au naufrage, comme si de rien n’était. Le CAC40 atteint ainsi un plus haut à 9 ans. Sur les mêmes seuils qu’en janvier 2008 ignorant Brexit, incertitudes et tensions géopolitique.
Une seule chose compte : les injections des banques centrales ! La meilleure illustration reste l’observation de l’obligation à 10 ans française, l’OAT, qui rebondit nettement. (Rappel : quand une obligation monte, cela signifie que le rendement baisse et donc que la dette est recherchée).
Quelle stratégie entre les deux tours ?
La prudence est de mise pour les investisseurs les plus agressifs. Le scrutin français devrait rester le focus des marchés et je serai étonné qu’on ne retrace pas la hausse de ce début de semaine. La bipolarisation extrême du corps électoral et la faiblesse de la portée des leaders des partis « traditionnels » remet en cause le report classique de voix. La victoire de Macron ainsi incertaine pourrait semer le doute dans les prochains jours. Je vous invite à surveiller la résistance vers 12 515 points sur le Dax qui pourrait jouer un rôle déterminant avant un repli vers 12 250.
En attendant… que la musique continue !